Le coup d'envoi des travaux pour la réfection de la rue Sainte-Catherine prévus cet hiver pourrait devoir être retardé, en plus de coûter beaucoup plus cher. Une entreprise demande aux tribunaux de bloquer l'attribution du premier contrat de cet important chantier, estimant avoir été injustement écartée de l'appel d'offres.

Clean Water Works (CWW) vient de déposer en Cour supérieure une demande d'injonction contre l'adoption demain par la Ville de Montréal d'un contrat de 9,2 millions à Insituform. La métropole a en effet décidé de confier à cette entreprise le mandat pour la réfection du principal égout circulant sous la rue Sainte-Catherine, travaux marquant la première étape du vaste projet de réfection de la principale artère commerciale de Montréal.

Seulement deux entreprises ont participé à l'appel d'offres, mais la soumission de CWW a été jugée « non conforme ». Pour l'écarter, la Ville de Montréal a en effet invoqué le manque d'expérience de son sous-traitant, décision que l'entreprise conteste.

L'appel d'offres précisait que les sous-traitants à ce chantier devaient avoir exécuté au cours des cinq dernières années un minimum de deux contrats de même nature, chacun d'une valeur de plus de deux millions.

CWW dit avoir obtenu depuis 2008 de la Ville de Montréal pas moins de 84 millions en contrats en réhabilitation et que son sous-traitant a systématiquement été le même, soit Manorex.

L'entreprise s'étonne de voir la métropole juger soudainement son sous-traitant non conforme puisque celle-ci vient tout juste de faire appel à Manorex pour réhabiliter d'urgence l'égout de la rue Mill, qui s'était effondré durant l'été, compliquant la circulation à l'entrée du pont Victoria.

Plus cher

CWW se dit d'autant plus étonnée que la décision coûtera beaucoup plus cher à la Ville de Montréal. L'entreprise avait offert de réaliser ces travaux pour 7,2 millions, alors qu'Insituform avait demandé 9,9 millions pour ses services lors de l'appel d'offres.

Après avoir disqualifié CWW, Montréal a toutefois négocié à la baisse le coût du contrat, pour s'entendre sur une somme de 9,2 millions. Reste que ce montant est de 30 % supérieur à l'estimation de la Ville.

Montréal a justifié cet écart par la difficulté à bien évaluer le coût pour dévier l'eau de l'égout durant le chantier, la complexité de tels travaux, ainsi que le nombre réduit d'entrepreneurs dans le domaine.

Le contrat en litige prévoit la réhabilitation d'un égout de 1,5 m de large sur une distance de 450 m, soit entre les rues Robert-Bourassa et De Bleury. Plutôt que d'ouvrir la rue, il a été décidé de procéder par chemisage, c'est-à-dire d'introduire une nouvelle conduite à l'intérieur de l'ancienne, technique moins onéreuse.

Retard

Cette contestation pourrait avoir de lourdes conséquences sur le calendrier des travaux, qui devaient débuter en novembre pour prendre fin en avril. Dans le document recommandant aux élus de confier le contrat à Insituform, les fonctionnaires notent que tout retard « pourrait avoir pour conséquence de devoir reconstruire certaines conduites au lieu de les réhabiliter, ce qui entraînerait des coûts beaucoup plus importants ». En effet, l'opération de chemisage doit avoir lieu en hiver, moment de l'année où les débits d'eau sont moindres dans les égouts.

Signe de l'importance de ces travaux sur la séquence de tout le chantier de la rue Sainte-Catherine, Montréal a prévu des pénalités de 10 000 $ par jour de retard afin de s'assurer que l'échéancier d'avril 2018 soit respecté.