Après les sportifs, au tour de la Ville de Montréal de se targuer de donner son 110%. La métropole a annoncé avoir retapé en 2016 plus de rues, d'égouts et de conduites que ce qui était prévu. Mais l'opposition dénonce ce qu'elle qualifie de «pavage électoral», estimant que ces travaux ont été faits au détriment de la sécurisation des intersections.

Les automobilistes l'auront remarqué avec l'omniprésence des cônes orange l'an dernier, la Ville de Montréal a continué à augmenter la cadence dans la réfection de ses infrastructures.

Alors que la métropole avait annoncé faire pour 531 millions en travaux en 2016, ce sont plutôt 581 millions qui ont été investis dans la réfection des chaussées et conduites souterraines. Du coup, Montréal dit avoir eu un taux de réalisation de 110%. «On a ouvert la machine et on voit les résultats», s'est félicité l'élu Lionel Perez, responsable des infrastructures au sein de l'administration Coderre.

Total gonflé

La question qui tue, maintenant : comment est-il possible de faire plus de travaux que ce qui est prévu, les chantiers prenant des mois de préparatifs avant de pouvoir être lancés? La Ville de Montréal explique calculer le taux de réalisation non pas en fonction du nombre de chantiers, mais bien de leur coût.

Des travaux entrepris en 2015 mais terminés en 2016 peuvent ainsi contribuer à gonfler le total. Et c'est précisément ce qui s'est produit l'an dernier, la métropole disant avoir rattrapé le retard pris dans les années passées en exécutant des travaux déjà lancés.

Planifiant toujours deux ans à l'avance ses travaux, la métropole affirme aussi avoir pris un peu d'avance sur certains chantiers qui ne devaient être réalisés qu'en 2017.

Tenir ses promesses

Reste que ce taux de réalisation de 110% est d'autant plus étonnant que Montréal ne réalisait que 35% de ses travaux planifiés en 2011. Depuis, la métropole dit avoir amélioré ses pratiques pour augmenter sa capacité à tenir ses promesses. Fini l'époque où les chantiers devaient être reportés d'année en année avant d'être réalisés.

Pas une hausse du coût des contrats

Surtout, Lionel Perez assure que ce résultat n'est pas attribuable à une soudaine flambée des prix demandés par les entrepreneurs. Au contraire, Montréal dit continuer à accorder ses contrats en moyenne 5% en deçà de l'estimation.

Autre preuve avancée par Montréal : la Ville a dépassé son objectif dans le nombre de kilomètres de rues et de conduites réparées. Ce sont en effet 198 km de rues qui ont été réparés en 2016, alors que l'objectif était de 177 km. Sous terre, Montréal a retapé 106 km de conduites d'égouts et d'eau, sur un objectif de 104 km.

Cadence maintenue

Même si de nombreux automobilistes ont trouvé difficile de circuler à Montréal en raison des nombreux chantiers, la Ville prévient qu'elle maintiendra la cadence en 2017, malgré les festivités entourant son 375e anniversaire de fondation.

Si le centre-ville sera épargné justement pour ne pas nuire aux festivités, les 18 autres arrondissements ne verront pas de baisse de régime. «La cadence va se maintenir, c'est un passage obligé», a indiqué Lionel Perez.

«Pavage électoral» et sécurité des piétons

Loin de se dire impressionnée, l'opposition à l'hôtel de ville voit dans ces résultats un signe de l'approche des élections, en novembre prochain. «On a misé énormément sur le pavage d'élection au détriment de la sécurisation des intersections. On met une couche d'asphalte un peu partout parce que l'élection s'en vient», dénonce Sylvain Ouellet, conseiller de la Ville de Projet Montréal.

L'élu note en effet que si la Ville de Montréal a réparé plus de rues que prévu, elle a raté de beaucoup son objectif de sécurisation des intersections. Seulement 343 des 565 chantiers devant améliorer des intersections ont eu lieu, soit 61%.

Employés réaffectés

Lionel Perez a reconnu être déçu du taux de réalisation des travaux aux intersections. Il a expliqué ce résultat par le fait que des employés qui devaient travailler à ces projets ont dû être affectés à l'amélioration des mesures préférentielles pour les autobus, ces travaux ayant été jugés prioritaires pour désengorger le réseau routier.

Qualité des travaux

Sylvain Ouellet s'inquiète aussi de la qualité des travaux. «Oui, on fait beaucoup de travaux qu'on va payer sur 20 ans, mais si au bout de 5 ans, ça craque déjà, on a un problème.» Il a cité en exemple la ruelle de l'avenue Drummond, dont l'aménagement a été terminé en novembre, mais qui s'est affaissée mardi. La Ville dit poursuivre son enquête, n'ayant pas trouvé de fuite d'eau à proximité pour expliquer cet effondrement.