Un cadre de la Ville de Montréal a dirigé un appel d'offres afin de favoriser une firme appartenant à un ami, a révélé une enquête du Bureau de l'inspecteur général (BIG). Le processus d'appel d'offres a été annulé, mais l'administration Coderre refuse de dire si l'employé en question a été sanctionné.

« La nature humaine étant ce qu'elle est, il ne faut pas être surpris. Il y a de la fraude dans n'importe quelle industrie, n'importe quel domaine », a réagi, hier soir, Lionel Perez, élu responsable de la gouvernance, au cours d'une mêlée de presse en marge du conseil municipal.

Lors de son enquête, le BIG a découvert qu'un chef de division avait demandé à ses employés de préparer les documents d'un appel d'offres sur invitation de façon à ce que la firme de son ami remporte le contrat. Les membres du comité de sélection ont également été choisis par ce chef de division, alors que cette procédure est normalement réservée au service de l'approvisionnement.

Le BIG est resté muet sur l'identité du cadre et de la firme. Il dit cependant que la Ville de Montréal cherchait à embaucher un « conseiller en contenu créatif ».

Le conseiller de l'opposition à l'hôtel de ville Alex Norris trouve extrêmement troublant le fait que le rapport du BIG n'identifie pas l'employé fautif. Il exige, au minimum, que l'employé soit suspendu, voire congédié.

« Ce n'est pas acceptable à Montréal de concevoir un appel d'offres de manière à favoriser un ami, et c'est une tendance que l'on voit malheureusement de plus en plus », a dénoncé M. Norris.

Les grandes lignes de cette enquête ont été rendues publiques hier dans le deuxième rapport annuel du BIG. Le document de 71 pages donne aussi les grandes lignes de six autres enquêtes du BIG menées en 2015 et qui ont donné lieu à des interventions (comme l'annulation d'un appel d'offres ou des recommandations) mais qui n'ont pas fait l'objet d'un rapport public étoffé.

TÉLÉPHONIE FILAIRE : L'APPEL D'OFFRES A RESTREINT LA CONCURRENCE

Dans son rapport annuel, le BIG « sensibilise » aussi la Ville au fait que l'appel d'offres qui a mené à l'acquisition de services de téléphonie filaire a restreint le marché à deux acteurs : Bell et Telus. Cette entente-cadre d'environ 15 millions prévoyait entre autres les services de téléphonie IP pour 8005 lignes et le service de téléphonie analogique « Centrex » pour 8217 lignes, et ce, pour une période de 60 mois à partir de novembre 2015.

« La plateforme Centrex est décrite comme étant une technologie désuète pour laquelle il n'y a que peu d'expertise et peu de possibilité d'évolution technologique. En exigeant que les soumissionnaires fournissent la technologie Centrex, l'appel d'offres faisait en sorte que ces derniers doivent s'approvisionner et obtenir un prix auprès de Bell ou Telus, puisque ce sont les deux entreprises dominantes pouvant offrir la technologie demandée. Or, Bell et Telus étaient également intéressées à obtenir le contrat », remarque l'inspecteur général, Me Denis Gallant, dans son rapport.

Le rapport annuel du BIG a été déposé au conseil municipal hier après-midi. Me Denis Gallant réagira publiquement aujourd'hui.