La Ville de Montréal se voit forcée de suspendre l'attribution de trois contrats d'une valeur de près de 50 millions, un juge ayant accordé une injonction provisoire à deux entreprises qui estiment avoir été injustement écartées des appels d'offres. Le report pourrait entraîner d'importants retards dans la réalisation de travaux jugés urgents que la métropole espérait terminer d'ici l'automne 2017.

La Presse a révélé hier que l'introduction de nouvelles règles dans certains appels d'offres avait soulevé la colère de nombreux entrepreneurs. Montréal a exigé des soumissionnaires qu'ils lui démontrent qu'ils avaient déjà effectué deux chantiers de voirie de plus de 10 millions au cours des cinq dernières années.

Disqualifiées, les entreprises Constructions Bau-Val et Demix ont chacune présenté une demande d'injonction pour bloquer le processus d'attribution de ces contrats, estimant avoir été injustement écartées des appels d'offres. Un juge de la Cour supérieure a accepté hier de leur accorder une injonction provisoire, suspendant le processus d'attribution des contrats au moins jusqu'au 29 mars.

Dans son jugement, le juge Louis Gouin souligne que « la disposition des appels d'offres reliée à l'expérience ne date que de la fin de 2015 et il s'avère donc plus qu'approprié de clarifier les règles du jeu afin de s'assurer qu'une telle disposition soit appliquée dans le meilleur intérêt de toutes les parties impliquées ».

L'intérêt des contribuables invoqué

Le magistrat ajoute que la cause ne touche pas uniquement l'intérêt des deux entreprises, mais aussi celui des contribuables. Les deux soumissionnaires écartés proposaient de faire le travail pour 4,3 millions de moins que les entreprises auxquelles Montréal souhaite accorder ces chantiers.

Le conseil municipal, qui était appelé à entériner ces contrats, les a ainsi retirés de l'ordre du jour. Le report de l'adoption de ces contrats pourrait entraîner d'autres retards et même l'annulation des appels d'offres si les recours judiciaires s'éternisent.

Les soumissions sont valides jusqu'au 26 mai pour deux des contrats et jusqu'au 2 juin pour le troisième. Au-delà de cette date, « le plus bas soumissionnaire conforme pourrait alors retirer sa soumission. Le cas échéant, il faudrait procéder à un autre processus d'appel d'offres et défrayer les frais afférents », notait un fonctionnaire de Montréal dans un document expliquant l'urgence de voter ces contrats.

Il reste deux réunions du conseil municipal d'ici à ce que les soumissions arrivent à échéance, soit les 18 avril et 16 mai. Reprendre le processus d'appel d'offres pourrait ainsi retarder les travaux de plusieurs mois.

Les trois chantiers au coeur du conflit concernent la réfection de segments du chemin de la Côte-Sainte-Catherine, du boulevard Saint-Michel et de l'avenue Papineau. Échelonnés sur plus d'un an, ces travaux doivent débuter au printemps pour prendre fin à l'automne 2017. Ils visent notamment à remplacer des conduites d'égout et aqueduc en mauvais état sous ces artères très achalandées.