Le nombre de remorquages durant les opérations de déneigement n'a pas diminué à Montréal malgré l'arrivée de l'application Info-neige, qui devait aider les Montréalais à mieux planifier leurs stationnements. La Ville affirme que la situation devrait s'améliorer lorsque le système sera mieux implanté, mais reconnaît que le problème s'avère plus complexe que prévu.

En misant sur les données colligées, la métropole a découvert certains phénomènes insoupçonnés, notamment qu'elle devait remorquer davantage de voitures après les petites tempêtes que les grosses.

Pas de baisse

Montréal a lancé en décembre 2014 Info-Neige afin de «réduire le nombre de voitures remorquées en offrant aux conducteurs la possibilité de mieux planifier leurs déplacements». Les données sur les remorquages rendues publiques permettent de constater que les cinq premiers arrondissements à avoir mis à l'épreuve cette application, téléchargée à plus de 100 000 reprises depuis, n'ont pas observé une telle baisse, l'hiver dernier. Trois d'entre eux ont plutôt observé une hausse marquée tandis que les deux autres ont connu une faible baisse, en autant d'opérations de chargement de neige.

Variation du nombre de remorquages entre 2014 et 2015

• Villeray-Saint-Michel-Parc-Extension +27 %

• Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce +22 %

• Ahunstic-Cartierville +18 %

• Ville-Marie -1 %

• Mercier-Hochelaga-Maisonneuve -8 %

• Moyenne +11 %

* Les données pour 2015 n'incluent pas les remorquages effectués en décembre, dont une opération décrétée le 30 décembre dernier.

Année de rodage

Le responsable du projet de Ville intelligente, Harout Chitilian, admet que la baisse attendue de remorquages ne s'est pas matérialisée l'hiver dernier dans les arrondissements ayant pris part au projet-pilote. Il attribue ce résultat au fait que le système était nouveau et qu'il fallait beaucoup de temps avant que l'application indique qu'une rue avait été déneigée.

Aujourd'hui, la mise à jour se fait automatiquement, grâce à l'ajout de GPS, facilitant l'utilisation du système. «C'était une année de rodage. Maintenant, on voit des améliorations dans les arrondissements qui ont participé au projet-pilote», assure l'élu. Les arrondissements d'Ahuntsic et de Villeray auraient ainsi observé une baisse du nombre de remorquages depuis le début de l'hiver.

Grosses tempêtes, petits remorquages

La tempête historique du 27 décembre 2012, qui a laissé 45 cm de neige sur Montréal, a-t-elle entraîné un nombre record de remorquages? Pas selon les données de remorquages de neuf arrondissements. En fait, «seulement» 4000 véhicules y ont été remorqués dans les 10 jours ayant suivi.

Les données sur les remorquages permettent plutôt de constater que les plus importantes vagues de remorquages surviennent étrangement à la suite de chutes de neige plus modestes. Par exemple, pour l'opération décrétée le 4 mars 2015, plus de 6500 véhicules avaient été remorqués en quatre jours alors qu'il était tombé 8 cm dans la semaine précédente.

Citoyens moins vigilants?

Harout Chitilian reconnaît que l'utilisation massive des données colligées lors des opérations a permis de découvrir certains phénomènes insoupçonnés, dont celui des hausses de remorquages lors des tempêtes plus modestes. «On dirait que les gens baissent leur garde, vérifient moins les pancartes et les outils à leur disposition», dit l'élu.

Mais une autre hypothèse pourrait également expliquer ce phénomène: les opérations de chargement progressent plus vite à la suite des petites tempêtes. Du coup, les automobilistes ont moins de temps pour déplacer leur voiture et moins de places disponibles pour se garer.

Attention aux soirs de semaines

Autre découverte grâce à l'utilisation des données: les remorquages surviennent principalement les soirs de semaines. Pas moins de 40% ont en effet lieu entre 19h et 23h. Les interdictions de stationner durant les opérations de chargement s'étendent en fait de 7h à 19h et de 19h à 7h. Or, plusieurs ne vérifieraient pas s'il y a interdiction de stationner en rentrant du travail, évoque Harout Chitilian.

À noter, on recense 20% moins de remorquages la fin de semaine, ce qui s'explique probablement par le fait que certains arrondissements suspendent leurs opérations les samedis et dimanches.

Palmarès des rues où se faire remorquer

Sans surprise, les arrondissements de Ville-Marie (centre-ville) et du Plateau-Mont-Royal sont les deux secteurs où l'on recense le plus de remorquages. Chaque hiver, environ 3900 voitures doivent être déplacées dans chacun de ces arrondissements.

C'est sur le boulevard René-Lévesque, dans Ville-Marie, où l'on recense le plus de remorquages sur une même artère. Viennent ensuite d'autres grands axes, comme le boulevard Saint-Laurent, la rue Saint-Hubert, la rue Saint-Denis, l'avenue Papineau et la rue Sainte-Catherine.

Harout Chitilian attribue le nombre élevé de remorquages dans ces quartiers et artères à la présence élevée de visiteurs de l'extérieur, moins habitués aux règles de stationnement de la métropole.

MÉTHODOLOGIE

La Presse a analysé les données ouvertes de la Ville de Montréal sur le remorquage des véhicules. Comme seulement neuf arrondissements utilisent le même système pour comptabiliser les remorquages depuis 2005, La Presse s'est uniquement penchée sur ces derniers. Nous avons exclu des moyennes les années 2005 et 2015, car les données étaient incomplètes. Les données météo d'Environnement Canada proviennent de la station à l'aéroport international de Montréal-Trudeau.