Alors que la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) s'oppose au projet d'oléoduc Énergie Est, une étude commandée par la Ville mais jamais rendue publique évalue que celui-ci aurait un impact « positif » pour la métropole. L'ajout de ce lien avec l'ouest du pays donnerait un sérieux coup de pouce au secteur pétrochimique de l'est de l'île de Montréal en contribuant à le rendre plus compétitif.

En janvier, les 82 maires de la CMM se sont publiquement opposés au projet d'oléoduc Énergie Est de TransCanada, invoquant les « faibles retombées économiques » pour la région par rapport aux risques environnementaux. Une étude de 2015 commandée par la Ville de Montréal et obtenue par La Presse concluait pourtant que le projet pourrait aider au développement de l'est de l'île en stimulant le secteur pétrochimique.

L'étude réalisée par la firme Raymond Chabot Grant Thornton indique que le projet « procurerait une nouvelle source d'approvisionnement en hydrocarbures aux deux raffineries québécoises, ce qui pourrait stimuler l'attraction de nouveaux joueurs dans le secteur du raffinage et de la pétrochimie ».

Les auteurs soulignent que le Québec importe la totalité du pétrole brut raffiné sur son territoire. En 2013, à peine 1 % des 116 millions de barils de pétrole brut importés provenait de l'ouest du pays. La moitié de l'approvisionnement en pétrole brut provenait plutôt d'Afrique, principalement d'Algérie. Or, le pétrole de l'Ouest était moins cher et aurait permis de rendre l'est de l'île plus compétitif.

Ce projet représenterait ainsi un important coup de pouce au secteur montréalais de la chimie, de la pétrochimie et de la plasturgie, qui a grandement souffert depuis le début du millénaire. Alors que ce secteur de la métropole représentait 15 545 emplois en 2001, il n'en comptait plus que 10 175 en 2011, soit le tiers de moins.

Et alors que plusieurs invoquent la diminution prochaine de la consommation de combustibles fossiles, le rapport émet de sérieux doutes.

« Rien n'indique, à l'heure actuelle, que la consommation d'hydrocarbures diminuera de façon marquée au Québec au cours des prochaines années et ceci, en dépit des intentions exprimées par les gouvernements et des souhaits de plusieurs. »

Les auteurs écrivent d'ailleurs que « l'efficacité du marché du carbone mis en place au Québec reste encore à démontrer ».

Étude écartée

Au cabinet du maire Coderre, on indique que la CMM a choisi d'écarter cette étude en raison de ses lacunes. « Elle n'inclut pas les déversements en cas de sinistre, et c'est justement là-dessus que les besoins se feront sentir », a indiqué Catherine Maurice, attachée de presse du maire. Les auteurs n'auraient pas suffisamment pris en compte la perte de valeur des terrains le long des emprises de l'oléoduc et du coût pour le développement des municipalités.

La Ville de Montréal a commandé cette étude à l'été 2014 à la firme Raymond Chabot Grant Thornton, qui a reçu 86 000 $ pour son travail. L'objectif était d'établir un « positionnement économique et de préparer un plan d'action concertée pour le secteur de la chimie, de la pétrochimie, du raffinage et du gaz sur le territoire de l'agglomération de Montréal ».

La métropole disait ainsi vouloir trouver comment « favoriser le maximum de retombées économiques » des deux projets d'oléoduc, soit l'inversement du flux de l'oléoduc 9B d'Enbridge et Énergie Est.

La Chambre de commerce de l'est de Montréal voit d'un bon oeil cette étude, elle qui a appuyé le projet. « Ce qu'on veut, c'est que les entreprises dans ce domaine puissent profiter de cette diversité d'approvisionnement », a dit sa directrice générale, Isabelle Foisy.

Nombre d'emplois du secteur chimie, pétrochimie et plasturgie à Montréal

• 2001: 15 545

• 2006: 13 105

• 2011: 10 175

Source: Statistique Canada

Approvisionnement en pétrole brut du Québec en 2013

• Algérie 31 %

• Nigeria 14 %

• États-Unis 9 %

• Norvège 8 %

• Mexique 7 %

• Royaume-Uni 4 %

• Est du Canada 4 %

• Angola 2 %

• Ouest du Canada 1 %

• Autres pays 20 %