Le projet d'implantation de services d'injection supervisée à Montréal a franchi une étape importante avec l'appui du maire Denis Coderre, qui vient de rédiger une lettre à cet effet aux autorités de la santé.

Le maire a aussi déposé sa lettre expliquant le soutien de la Ville de Montréal au projet lors d'une séance du comité exécutif, mercredi.

Le projet du Centre de santé et des services sociaux (CSSS) Jeanne-Mance et de l'Agence de la santé et des services sociaux de Montréal vise à implanter trois lieux fixes et une unité mobile d'injection supervisée d'ici trois ans.

Dès la première année, l'organisme communautaire Cactus offrirait un lieu fixe et une unité mobile devrait couvrir les autres quartiers, a expliqué en entrevue la docteure Carole Morissette, responsable médicale du secteur vigie et protection à la Direction de la santé publique à l'Agence de Montréal.

Pour que le projet puisse voir le jour, cependant, il devra obtenir l'aval du gouvernement du Québec, ainsi qu'une exemption de Santé Canada à la Loi sur les drogues. C'est l'étape de l'approbation fédérale qui semble la plus incertaine.

«Pour ce qui est de la demande d'exemption, c'est extrêmement favorable d'avoir le plus d'appuis possible et c'est très clair qu'un appui aussi clair et aussi important de la part du maire nous apparaît comme étant une étape très, très importante dans le processus de travail. Ça nous donne de la force et de la pertinence au niveau de notre demande d'exemption», a expliqué la docteure Morissette.

Dans sa lettre d'appui, le maire Coderre vante ces services comme étant «une solution efficace» à un «problème de société complexe». Il dit croire qu'ils seront de nature à améliorer «la cohabitation sociale dans les espaces publics», en réduisant le phénomène des injections en public et en diminuant le nombre de seringues souillées qui traînent dans les parcs et les ruelles.

Le maire Coderre souligne également que le Service de police de la Ville de Montréal travaille avec les autorités concernées de la santé et qu'il a offert sa collaboration pour le maintien de l'ordre public.

M. Coderre rappelle aussi que les services d'injection supervisée seront sous la supervision d'infirmières du Centre de santé et des services sociaux Jeanne-Mance, en collaboration avec des intervenants qui travaillent dans des organismes venant en aide à cette clientèle.

La docteure Morissette concède que la bataille n'est pas gagnée auprès du gouvernement fédéral. «On s'attend quand même à ce que le gouvernement fédéral regarde la demande d'exemption et la scrute avec certaines exigences. On sait aussi le positionnement du gouvernement actuellement», mais elle assure que le projet qui a été déposé «devrait répondre en tous points aux exigences du fédéral».

Membre fondateur de l'organisme Cactus, Me Louis Letellier de St-Just s'attendait à cet appui du maire Coderre, puisqu'il avait déjà exprimé son ouverture à ce sujet en campagne électorale. Sa lettre demeure «une reconnaissance officielle qui tombe à point» pour l'organisme, argue-t-il.

Il dit avoir «de bonnes raisons de croire» que Québec va endosser le projet, mais l'incertitude demeure quant aux intentions du gouvernement Harper. «La bataille n'est pas gagnée. On sait qu'on devra franchir le mur qui est érigé actuellement à Ottawa au bureau de la ministre de la Santé» Rona Ambrose, a-t-il concédé.

À Ottawa, on ne s'est pas trop avancé sur la question, même après avoir pris connaissance de la lettre d'appui du maire Coderre.

«La position de notre gouvernement est claire: les collectivités à Montréal méritent un droit de parole également sur l'établissement d'un lieu de consommation supervisée de drogues illicites dans leur voisinage. Nous avons proposé une nouvelle loi rigoureuse qui permettra aux autorités policières, aux élus municipaux et aux résidents d'une collectivité de donner leur opinion avant qu'un permis ne soit accordé à un lieu de consommation supervisée. Un lieu de consommation supervisée de drogues injectables ne devrait jamais être établi sans une consultation préalable de la collectivité en question», a affirmé Michael Bolkenius, attaché de presse de la ministre Ambrose.