BIXI confirme avoir versé 223 000 $ à ses employés un mois avant de se placer sous la protection de la Loi sur la faillite. Des bonis qualifiés d'«indécents» par le maire de Montréal, Denis Coderre.

Les cabinets du maire et de l'opposition ont reçu lundi soir des informations d'une source anonyme leur révélant que des bonis ont été accordés en décembre au sein de la Société de vélo en libre-service (SVLS). Les responsables de BIXI ont confirmé mardi que les 39 employés ont reçu en moyenne 5800 $ chacun en sommes forfaitaires à la fin de 2013. La moyenne des versements chez les cinq hauts dirigeants est toutefois de 15 300 $.

«Je trouve ça indécent, ce n'est pas acceptable», s'est indigné le maire en point de presse. Il a avancé que la somme totale était de 275 000 $, mais la SVLS parlait plutôt de 223 379 $.

Chez BIXI, on assure qu'il ne s'agit pas de véritables bonis, mais de « compléments de rémunération » pour tenir compte du fait que les salaires des employés sont inférieurs à ceux du marché. La politique de rémunération de la SVLS prévoit donc le versement d'une somme complémentaire quand certains objectifs sont atteints.

«Paradoxalement, 2013 a été la meilleure année connue par la SVLS. On a réalisé un chiffre d'affaires de 60 millions, livré cinq villes : les employés ont atteint les objectifs et le conseil d'administration a voulu reconnaître leur performance», dit Michel Philibert. Celui-ci assure que la faillite de BIXI n'est pas liée à sa performance, mais à ses problèmes de liquidités.

Michel Philibert ajoute qu'au moment d'accorder les sommes en question, «on avait toujours bon espoir de passer au travers».

Le maire digère particulièrement mal le fait d'avoir appris le versement de ces bonis alors que la Ville travaillait, en décembre, à un plan de sauvetage de BIXI. «Ils savaient que le mur s'en venait. Personne n'a été surpris par la demande de faillite.»

«C'est choquant, d'autant plus que mon objectif, c'est de sauver la saison 2014 de BIXI. Ils doivent se garder une petite gêne. On est à la croisée des chemins», a ajouté M. Coderre.

Fait à souligner, les sommes versées en bonis en décembre représentent, à peu de choses près, le remboursement mensuel que la SVLS omettait de faire depuis quelques mois pour son prêt à la Ville de Montréal.

L'opposition s'est faite cinglante. «Si la direction se donne des bonus juste avant la faillite, on parle de fraude», a dénoncé le conseiller Marc-André Gadoury, de Projet Montréal, qui a rendu public le versement des bonis.

L'opposition croit que les hauts dirigeants auraient pu à tout le moins refuser les bonis, puisqu'ils savaient que la SVLS avait des difficultés financières. «S'il y a un boni de performance remis à un employé qui a réussi à être très productif dans le retour de vélo ou la réparation, ça va, mais un boni remis à un directeur général qui doit mettre la société en faillite quelques semaines plus tard, on ne peut pas parler d'un boni de performance», a dit M. Gadoury.

Rappelons que la Ville de Montréal a demandé à la mi-janvier à la SVLS de se placer sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers, en raison de ses dettes frôlant les 50 millions. La métropole voulait ainsi s'assurer d'être créancier prioritaire, puisqu'elle a une créance de 31,6 millions.

Plus tôt lors du conseil municipal, le maire a dénoncé le manque de transparence dans la gestion de BIXI lorsqu'il a été questionné par un citoyen. «Il y a eu un problème d'opacité», a reconnu Denis Coderre. Celui-ci a rappelé qu'«on n'est pas BIXI, on est un créancier». La SVLS, qui gère BIXI, n'a pas présenté publiquement ses états financiers depuis 2012.

Photo Jacques Boissinot, archives PC

Denis Coderre