Dès 2011, le cabinet du maire de Montréal ainsi que les partenaires régionaux ont été alertés de la nécessité de mettre en place un plan d'urgence afin de faire face à une éventuelle fermeture complète du pont Champlain. Mais l'annonce du remplacement de cette infrastructure rongée par la corrosion a stoppé leurs premiers élans.

Selon des personnes proches du dossier qui ont requis l'anonymat, l'administration du maire Gérald Tremblay a fait la sourde oreille aux recommandations qui lui étaient faites à l'interne. «L'analyse de risques a été très limitée. Les mesures de coordination ont pris l'allure d'un comité dont le véritable porte-parole est devenu Jacques Olivier, l'ancien maire de Longueuil», raconte une des sources.

En effet, la Coalition Champlain s'est mise en place à la faveur de la campagne électorale fédérale, avec à sa tête M. Olivier. Ce dernier parle alors de «l'urgence d'agir» et rappelle surtout la responsabilité d'Ottawa s'il devait survenir un accident. Quelques semaines plus tôt, Denis Coderre, qui était alors député libéral, avait même soulevé la grave question de la négligence criminelle.

«Qu'est-ce qu'on attend pour bâtir un nouveau pont? Est-ce qu'on aime mieux ça, ou aller en cour pour négligence criminelle?», avait alors lancé M. Coderre à la Chambre des communes. «Je pense toujours la même chose», a affirmé le maire Coderre la semaine dernière.

Plan d'urgence



Les risques d'effondrement du pont Champlain furent connus publiquement en janvier 2011. Au sein de l'administration montréalaise, sous l'autorité du directeur général de l'époque, Louis Roquet, on planche sur une gestion de risques applicable advenant une fermeture partielle, progressive ou même complète du pont. Il est notamment question de concertation avec les gouvernements, l'Agence métropolitaine de transport et les municipalités voisines, d'actualisation des priorités en matière de transport et d'accélérer les investissements.

Discours rassurant

De son côté, le ministre fédéral des Transports tient rapidement un discours rassurant sur la sécurité des automobilistes qui traversent le pont chaque jour. Le pont Champlain «sera bon pour les 10 prochaines années», déclarait alors le ministre Chuck Strahl.

Après le scrutin de mai 2011, Denis Lebel prend le relais du dossier des Transports. Le 5 octobre 2011, M. Lebel annonce le remplacement du pont Champlain en 2021, au coût de 5 milliards, qui sera construit en partenariat public-privé. Le ministre affirme également que le pont est «sécuritaire».

«Ç'a été la fin de l'urgence et le début du déni collectif. Tout le monde a pelleté le problème en avant. Les solutions qui auraient pu être mises de l'avant pour prévenir l'inévitable ont été ignorées», soutient une personne proche du dossier.

Dans les mois suivants, le poste de coordination des impacts en transport sera aboli à la Ville de Montréal.