Près d'un mois après avoir fermé trois gros chantiers de construction dans l'ancienne gare de triage Turcot, le ministère des Transports du Québec (MTQ) ne sait toujours pas quand pourront reprendre les travaux en raison de rapports d'analyses contradictoires sur la présence d'amiante dans le sol.

Selon le MTQ, une centaine d'échantillons de sols prélevés dans les trois chantiers ces dernières semaines ont été analysés par deux laboratoires distincts qui ont produit des résultats très différents.

Le premier laboratoire n'a rapporté aucune présence décelable d'amiante dans ces échantillons alors que le second a détecté de faibles concentrations. Selon le MTQ, 90% des échantillons soumis par le Ministère au second laboratoire ont donné des résultats positifs pour la présence d'amiante.

Les fibres toxiques représenteraient entre 0,1% et 1% des volumes de sols analysés, selon les résultats divulgués à La Presse par le Ministère.

En raison de l'incertitude créée par ces résultats contradictoires, le MTQ poursuivra ces analyses avec la collaboration du Consortium de recherche appliquée en traitement et transformation des substances minérales (COREM), afin de raffiner ses études de terrain et ses méthodes de caractérisation.

Dans l'intervalle, a ajouté Caroline Larose, une porte-parole du MTQ, un programme de protection des travailleurs contre l'inhalation de fibres d'amiante sera mis en place sans attendre une confirmation hors de tout doute de la présence de ces fibres toxiques dans les sols de l'ancienne gare de triage.

En vertu de ces mesures, les travailleurs devront porter une combinaison complète étanche et un masque respiratoire en tout temps pendant les travaux. La zone de chantier sera clôturée et le MTQ procédera à l'installation de vestiaires afin de permettre aux travailleurs d'abandonner leur tenue de travail et de prendre une douche pour se débarrasser de toute poussière potentiellement toxique avant de quitter les lieux.

Certains travaux nécessitant des mouvements de sols pourraient également être réalisés sous arrosage afin de rabattre au sol les poussières soulevées par le chantier.

Tolérance zéro

Les trois chantiers majeurs, interrompus depuis le 24 octobre, sont reliés au projet de reconstruction de l'échangeur Turcot, dans le sud-ouest de Montréal. Les travaux concernent la construction du nouveau boulevard Pullman dans l'ancienne gare de triage Turcot, située sous l'échangeur du même nom, la construction de l'avenue Carillon, entre les rues Pullman et Notre-Dame, et celle d'une bretelle du futur échangeur, entre les autoroutes 15 et 20.

Après une première découverte d'amiante, dont un échantillon de sols montrait une concentration importante de fibres sur le chantier du boulevard Pullman, le MTQ a suspendu tous les travaux exigeant des mouvements de sols afin de prévenir la dispersion de poussière potentiellement toxique dans l'air.

À ce jour, le MTQ a limité les analyses de sols aux chantiers actifs dans l'ancienne gare de triage. Il devra toutefois étendre ses investigations au reste des terrains de cette gare, qui occupent en tout 85 hectares, soit environ deux fois et demie la superficie du parc La Fontaine à Montréal. L'immense terrain, acquis du Canadien National il y a 10 ans, est destiné à servir de «camp de base» au MTQ lors des travaux de reconstruction de l'échangeur, à compter de 2015.

La présence confirmée d'amiante sur les lieux pourrait obliger le MTQ à prendre des mesures de précaution coûteuses et encombrantes tout au long des travaux de reconstruction, qui s'étendront sur au moins cinq ans.

Les règles de santé et sécurité au travail, au Québec, prescrivent la tolérance zéro en matière d'exposition des travailleurs aux fibres d'amiante qu'on retrouve souvent dans les murs d'immeubles publics, dans des tuiles de plafond ou de plancher ou encore dans plusieurs types de machines industrielles servant à la combustion de matières diverses.

L'inhalation de fibres d'amiante peut augmenter les risques de cancer du poumon même chez les non-fumeurs, et est associée à d'autres formes de maladies mortelles telles que l'amiantose (ou fibrose pulmonaire) ou le mésothéliome, un cancer qui s'attaque à la plèvre pulmonaire ou à la cavité abdominale.