Oubliez les économies d'échelle: les grandes villes sont plus chères à gérer, révèle une étude de HEC Montréal. Une comparaison du coût des services municipaux de toutes les villes du Québec démontre que ce sont les municipalités de taille moyenne qui réussissent à servir leurs citoyens au meilleur prix.

Le Centre sur la productivité et la prospérité de HEC Montréal a compilé les informations financières que les 1110 villes québécoises transmettent chaque année au ministère des Affaires municipales. Ces quelque 100 000 données colligées ont permis aux chercheurs d'établir un palmarès inédit du coût des services municipaux pour l'année 2011.

À consulter :

> Notre carte interactive de coût des services municipaux à l'échelle du Québec 

Leurs travaux permettent de constater que les municipalités de 50 000 à 100 000 habitants offrent globalement les plus faibles coûts de services municipaux. «Cette taille permet de livrer des services à un coût moindre que dans les villes plus grandes et plus petites», constate Robert Gagné, directeur du centre de recherche.

Parmi ces neuf villes de taille moyenne, Drummondville se démarque clairement, notamment grâce à ses faibles dépenses pour l'entretien des rues et à ses frais de distribution de l'eau potable.

Robert Gagné prévient que ce palmarès ne reflète pas la performance des municipalités, mais bien le coût de ses services. Plusieurs facteurs peuvent influencer les coûts, comme l'âge des infrastructures. «Et une ville qui ne dépense pas, ce n'est pas nécessairement un bon signe. Si on n'investit pas, le bassin d'infrastructures va se dégrader», souligne-t-il.

Les chercheurs préviennent que ces indicateurs soulèvent davantage de questions qu'ils n'en résolvent. Pourquoi la collecte des déchets coûte plus cher à Longueuil (73$/hab.) qu'à Montréal (60$/hab.), alors que les ordures n'y sont ramassées qu'une fois par semaine, contre deux fois dans l'île? À défaut de pouvoir répondre à toutes les interrogations, les chercheurs du Centre sur la productivité et la prospérité affirment qu'ils veulent rendre accessibles les données des villes pour permettre aux citoyens de poser des questions à leurs élus.

Montréal parmi les villes les plus chères

Signe que les économies d'échelle ne remplissent pas leurs promesses, la plus importante ville du Québec, Montréal, se classe en queue de peloton dans ce palmarès.

«Ce qui est particulier, c'est qu'à Montréal, la plus grande ville, les coûts sont comparables à ceux d'une toute petite ville», constate Robert Gagné. Avec moins de citoyens pour se partager la facture des services, les petites municipalités affichent des coûts élevés.

Globalement, les services de Montréal évalués coûtent 60% plus cher que la moyenne des neuf autres villes de plus de 100 000 habitants. Ainsi, l'entretien des rues de la métropole coûte cinq fois plus cher qu'à Saguenay, le coût du déneigement représente trois fois celui de Sherbrooke et la protection contre les incendies, deux fois celui de Terrebonne.

Le coût par habitant du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) est aussi le plus élevé parmi les grandes villes. Il faut préciser que la métropole est la seule ville à devoir offrir un service de niveau 5, le plus élevé parmi les corps policiers municipaux. Le SPVM doit notamment pouvoir répondre à des attaques terroristes, ce à quoi ne sont pas tenus les autres corps policiers.

«Attention, la différence ne peut et ne doit pas être uniquement imputée au fait que Montréal est une ville centre. Il faut aussi se demander si une partie de ça est de la mauvaise gestion», dit Robert Gagné.

Le palmarès de HEC Montréal permet également de constater que toute la grande région de Montréal est plus chère à gérer que la moyenne des municipalités québécoises. La majorité des 82 municipalités de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) apparaissent en queue de peloton. En fait, plus on se rapproche de l'île, plus le coût des services augmente. Il tend au contraire à diminuer à mesure qu'on s'en éloigne.

D'ailleurs, les rares villes de la région de Montréal faisant bonne figure au palmarès sont souvent situées en périphérie de la CMM, comme Saint-Lazare, Saint-Amable et Chambly.

Éclaboussé par le scandale de la collusion et la corruption, Laval ressort tout de même de ce palmarès comme étant légèrement moins cher à gérer que la moyenne. «Il ne faut pas mélanger la gestion courante d'une municipalité versus les projets d'investissements. La collusion s'est jouée dans les projets d'investissements. Ce n'est pas parce qu'un maire est véreux et s'en met plein les poches que c'est un idiot et qu'il n'est pas capable de bien gérer sa ville», explique M. Gagné.

Centres urbains éloignés

À l'inverse, les centres urbains plus éloignés de Montréal, comme Rimouski, Trois-Rivières et Saint-Georges-de-Beauce, semblent bénéficier de services municipaux plus économiques. Ces villes ont toutes une richesse foncière plutôt faible, souligne Robert Gagné. «Quand on n'a pas d'argent, on n'en dépense pas. On ne peut pas arriver avec des services municipaux chromés et taxer du monde peu fortuné. Ça ne marche pas. Ils sont peut-être très productifs, arrivant à offrir des services malgré tout de très bonne qualité. Ils arrivent, avec des moyens limités, à faire des choses intéressantes.»

Palmarès des 10 plus grandes villes du Québec

1. Trois-Rivières : -18%

2. Lévis : -9%

3. Sherbrooke : -5%

4. Saguenay : -3%

5. Laval : -3%

6. Longueuil : -2%

7. Gatineau : =

8. Terrebonne : +4%

9. Québec : +15%

10. Montréal : +59%

Écart entre le coût des services municipaux par rapport à la moyenne des 10 plus grandes villes du Québec