La Ville de Montréal poursuit deux ingénieurs qui auraient aidé l'entrepreneur Lino Zambito à facturer 300 000$ en faux extras. La métropole estime que Marc Dagenais et Éric Fortier ont permis à Infrabec de gonfler indûment la facture d'un important chantier en 2005.

En juin, la métropole a intenté une poursuite de 300 000$ contre Lino Zambito et Michel Lalonde, président de la firme de génie Génius. La Ville tente ainsi de récupérer les fausses dépenses que l'entrepreneur en construction a reconnu avoir empochées, devant la commission Charbonneau, lors de la construction d'un égout dans la rue Sherbrooke. Le témoin avait affirmé que cet argent devait aller à l'ex-directeur général de la Ville, Robert Abdallah.

Voici que Montréal a décidé d'ajouter à sa poursuite deux ingénieurs qui auraient permis le paiement de ces faux extras. Marc Dagenais travaillait à l'époque pour Infrabec. Lors de son témoignage devant la Commission, Lino Zambito a indiqué que son ingénieur était au courant concernant un faux extra qu'il comptait réclamer. «Il était au courant que l'ingénieur devait nous passer un 500 000$ dessus», a-t-il reconnu. Montréal avait finalement accepté de payer 300 000$.

Éric Fortier était quant à lui ingénieur chez Génius, responsable de la surveillance du chantier d'Infrabec. C'est lui qui aurait recommandé à la Ville de payer une partie des extras réclamés par Infrabec, selon un document présenté à la Commission.

«L'entente de paiement entre Lino Zambito, Michel Lalonde et Génius nécessitait la participation des chargés de projet d'Infrabec et de Génius», explique la Ville dans un document pour justifier ses démarches judiciaires.

Sans dévoiler les informations dont elle dispose pour étayer sa poursuite, Montréal précise que «les fausses dépenses supplémentaires étaient d'abord négociées et intégrées par messieurs Dagenais et Fortier dans les décomptes éventuellement soumis à la Ville pour paiements. C'est sur la base de ces décomptes artificiellement gonflés que la Ville faisait un paiement qui, sans qu'elle le sache, incluait des sommes auxquelles Infrabec n'avait pas droit».

Rappelons que ce faux extra devait servir à couvrir le coût supplémentaire pour utiliser des tuyaux de béton armé de la firme Tremca. Lino Zambito a affirmé que le directeur général de Montréal de l'époque avait insisté pour qu'Infrabec utilise ce produit, plus cher. Selon lui, Robert Abdallah devait empocher 300 000$ grâce à ce changement.

Ingénieurs peu connus

Outre son rôle sur le chantier d'Infrabec, très peu d'informations ont circulé à la Commission sur l'ingénieur Éric Fortier. Lino Zambito a toutefois été plus loquace sur son ancien employé, Marc Dagenais. Il a notamment affirmé que, comme ses autres ingénieurs, il participait aux factures de complaisance servant à justifier de faux extras.

Il a aussi indiqué qu'il était au courant pour la collusion entre les entreprises de construction. «C'est sûr qu'à force de demander de rentrer un prix, ils voyaient qu'on ne mettait pas de temps et d'effort sur la soumission; il est venu le moment où [...] ils ont compris de la façon que ça fonctionnait et, oui, ils étaient au courant de ce qui se passait.»

Lino Zambito a aussi indiqué que son ingénieur lui a servi de prête-nom pour des dons de 3800$ au Parti libéral du Québec et de 500$ au Parti québécois.