Le chef de projet Montréal, Richard Bergeron, promet de recouvrir une partie de l'autoroute Ville-Marie d'ici 2016 s'il est élu maire à l'élection de novembre. Ses opposants l'accusent de faire preuve de «comptabilité créative» en évaluant le coût des travaux à un maximum de 75 millions.

Tous les partis montréalais s'entendent sur l'importance de recouvrir l'autoroute Ville-Marie, cette tranchée routière coupant le centre-ville du Vieux-Montréal. Reste toutefois à régler d'épineuses questions: comment, quand et combien?

Richard Bergeron a annoncé hier qu'une administration Projet Montréal s'attaquerait en priorité au tronçon de 500 mètres entre le Palais des congrès et le futur Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM), remettant à plus tard tout le projet de recouvrement à l'est. Il évalue que l'ensemble de ces travaux pourrait être réalisé d'ici 10 ans.

Pour y arriver, l'aspirant maire propose de subdiviser ce tronçon en trois phases. Projet Montréal s'engage ainsi à recouvrir d'ici 2016 les 125 mètres entre la rue Sanguinet et l'avenue de l'Hôtel-de-Ville. L'endroit accueillerait une nouvelle place publique au pied de la station de métro Champ-de-Mars.

La date de 2016 n'a pas été choisie au hasard: elle coïncide avec l'inauguration du nouveau CHUM, où 16 000 personnes se rendront quotidiennement, selon les projections.

Dans une deuxième étape, le parti compte miser sur l'agrandissement du Palais des congrès pour terminer le recouvrement entre la rue Saint-Urbain et le boulevard Saint-Laurent. Enfin, le dernier tronçon de 215 mètres entre Saint-Laurent et Hôtel-de-Ville serait réalisé dans une troisième et dernière étape.

Guerre de chiffres 

Richard Bergeron conteste les coûts de 500 millions pour le recouvrement entre le Palais des congrès et le CHUM évalués par une étude de faisabilité de 1,5 million, réalisée conjointement par la Ville de Montréal et le ministère des Transports du Québec (MTQ). «Ce sont des chiffres d'avant la commission Charbonneau, quand les firmes de génie et l'industrie de la construction considéraient que les coffres de la Ville, c'était un endroit où se servir allègrement. Il n'y a pas de raison que ça coûte plus de 50 à 75 millions», a-t-il évalué. Pour arriver à ces chiffres, il se fie aux coûts du recouvrement du Quartier international, à l'ouest du Palais des congrès, réalisé durant les années 90.

Selon Richard Bergeron, seule la première phase, entre Hôtel-de-Ville et Sanguinet, sera réalisée aux frais des contribuables. Les deux autres phases, à l'ouest, ne coûteraient rien à la Ville, puisque la construction serait intégrée au coût de l'agrandissement du Palais des congrès et de bâtiments privés à ériger au-dessus de la tranchée autoroutière.

Appel à la patience

Si ses rivaux à l'élection de novembre s'entendent sur l'importance du recouvrement, ils se montrent toutefois plus prudents sur le calendrier des travaux et sur les coûts. «Ça se fait à coût nul dans la mesure où il y a des investissements sur une période de cinq ou dix ans. Dans les faits, pour amorcer le projet, la Ville de Montréal ne peut le faire seule», a indiqué Réal Ménard, de Vision Montréal. Il souligne que la Ville n'a prévu aucune somme pour l'instant dans le plan d'investissement des trois prochaines années, soit de 2014 à 2016.

Réal Ménard, qui siège actuellement au comité exécutif de Montréal, estime qu'il faut d'abord convaincre le gouvernement du Québec d'investir dans le projet avant de se lancer. Après tout, la plus grande partie des retombées iront dans les coffres du gouvernement provincial, et non de la Ville.

Quant aux coûts avancés par l'aspirant maire, Réal Ménard préfère se fier aux données de l'étude de faisabilité, qui avait évalué le chantier à 500 millions, plutôt qu'aux évaluations du chef de Projet Montréal. «M. Bergeron se livre des fois à une amicale comptabilité créatrice, mais je pense qu'il faut être rigoureux.»

Équipe Coderre appelle aussi à la prudence. «C'est un projet qui fait consensus dans le secteur. Maintenant, il faut le faire de façon responsable. Avant de lancer toutes sortes de chiffres, il faut voir ce qu'on veut faire exactement», a dit Philippe Schnobb, candidat du parti de l'ex-député fédéral.