Une autre tuile pour la Ville de Montréal: après les nombreuses allégations de corruption et de collusion faites à la commission Charbonneau, voilà que le ministère des Affaires municipales (MAMROT) dit avoir découvert de nombreuses lacunes dans le processus d'attribution de contrats du bureau du Vérificateur général.

En mai 2011, les inspecteurs du MAMROT ont analysé 144 contrats accordés par le vérificateur général ou à sa demande entre le 3 juin 2009 et le 31 mars 2011.

Leurs conclusions, publiées hier en toute fin d'après-midi sur le site web du ministère, révèlent notamment qu'un contrat d'une valeur de plus de 100 000$ accordé à une firme comptable sans appel d'offre grâce à une autorisation de la ministre à couté 236 000$ de plus que prévu. La ministre avait accepté que le contrat ne fasse pas l'objet d'un appel à condition qu'il ne dépasse pas les 400 000$. La facture est grimpée jusqu'à 636 004$. Un dépassement des coûts de plus de 50%. «De ce fait, il est difficile de prétendre que toutes les conditions en vertu desquelles la ministre a permis à la Ville d'être soustraite à l'obligation de procéder à un appel d'offres ont été respectées», dit le rapport du Ministère. Rien d'illégal, mais la modification apportée au prix du contrat aurait dû être autorisée, lit-on.

54 contrats à 15 fournisseurs

Toujours selon l'enquête, le bureau du Vérificateur a accordé 54 contrats de service professionnels d'une valeur de moins de 25 000$ aux 15 mêmes fournisseurs. Plusieurs se sont vu confier un minimum de deux contrats et dans certains cas, jusqu'à sept. Ainsi, la valeur par contrat était toujours inférieure à 25 000$, seuil à partir duquel les appels d'offres sont requis, mais la somme totale remise aux fournisseurs dépasse largement cette somme. «Dans deux cas, des factures ont été modifiées réduisant le montant de la dépense de sorte qu'il ne dépasse pas la valeur du contrat initial. Le montant résiduel des dépenses a été facturé et imputé à un second contrat conclu successivement», dit le document.

Des éléments qui font croire aux inspecteurs du MAMROT qu'il y aurait eu division volontaire de certains contrats «en plusieurs contrats en semblable matière d'une valeur de moins de 25 000$.»

Complètement faux, répond le bureau du Vérificateur général, qui se défend d'avoir eu l'intention de contourner la loi ou d'avoir procédé à une quelconque division de contrats dans le but de contourner les règles.

«D'ailleurs, le rapport ne fait ni état d'irrégularité ni d'illégalité. Il n'adresse pas de blâme», a martelé le porte-parole du Vérificateur général, Gilles Corriveau, en entrevue à La Presse. Selon lui, les récriminations du MAMROT ne sont en fait que des «divergences d'interprétation juridique quant aux dispositions techniques auxquelles seraient soumis les vérificateurs généraux municipaux dans les processus d'attribution de contrats». «Le Vérificateur ne peut pas passer son temps à aller en appel d'offres. Ses vérifications doivent être confidentielles. Il ne peut pas les annoncer à l'avance, ça irait totalement contre son mandat», dit M. Corriveau.

Au sujet des 54 contrats attribués aux 15 mêmes fournisseurs, il explique qu'ils l'ont été pour terminer des vérifications commencées et qui demandaient plus de travail que prévu. «On donne le contrat à la firme qui travaille déjà sur le dossier. C'est logique.»

Il note que les conclusions du Ministère ne s'appuient sur aucun avis juridique (du moins, on n'en fait pas mention dans le rapport) alors que la réponse du bureau du Vérificateur, fournie au gouvernement et publiée à la fin du même document, s'appuie sur l'opinion de trois juristes. «Le MAMROT n'a aucune preuve pour soutenir son opinion», dit le porte-parole.