Le vérificateur général, Jacques Bergeron, s'oppose à ce que les médias publient le contenu des courriels que la Ville de Montréal a consultés et copiés dans le cadre d'une «enquête» du contrôleur général Pierre Reid.

Le procès sur l'espionnage des courriels du vérificateur s'est poursuivi, jeudi, au palais de justice de Montréal.

La procureure du vérificateur général, Me Chantal Chatelain, a longuement plaidé pour le maintien d'une ordonnance de non-publication sur toute information découlant du contenu des courriels, y compris les milliers de pages qui n'ont pas été produites devant le tribunal, ainsi que la mise sous scellé des courriels. Cette ordonnance temporaire a été adoptée peu de temps après le dépôt de la poursuite du vérificateur contre la Ville de Montréal. Le vérificateur général souhaite ainsi prévenir toute fuite d'information dans les médias. Il vise aussi à protéger «l'institution» qu'est le Vérificateur général en garantissant la confidentialité aux personnes qui ont transmis des informations au vérificateur général ainsi qu'aux procureurs et juricomptables avec qui il travaille.

«L'intérêt public est que les contribuables, les justiciables et toutes les personnes qui ont à s'adresser au vérificateur général aient confiance dans la confidentialité de leur communication avec le vérificateur général et dans ses travaux», a déclaré Me Chantal Chatelain.

La Ville de Montréal se défend de vouloir révéler au grand jour les milliers de pages qui ont été espionnées et parle plutôt d'un «nombre limité» de courriels. «J'offre à ma collègue, avant de les rendre publics, de [les] lui montrer et de lui demander si elle a des objections à faire valoir et, si tel était le cas, on fait trancher la cour», a expliqué l'avocat de la Ville, Me Sylvain Lussier.

Gesca, groupe de quotidiens dont fait partie La Presse, ainsi que Radio-Canada ont plaidé pour que l'ordonnance de non-publication soit levée. Selon le procureur de Gesca et Radio-Canada, Christian Leblanc, l'ordonnance en vigueur est si vaste qu'elle correspondrait à imposer un huis clos aux journalistes qui couvrent le procès. Puisque les journalistes ne connaissent pas le contenu des milliers de documents visés par l'ordonnance, ils se retrouveront muselés de peur de révéler une information qui s'y trouve et, par conséquent, d'être reconnus coupables d'outrage au tribunal. Il a affirmé que les ordonnances demandées contreviennent au droit à la liberté d'expression, à la liberté de la presse ainsi qu'au droit du public à l'information.

La première portion du procès, qui touche des questions de procédure, se déroule jusqu'à aujourd'hui. Le débat sur le fond du dossier, c'est-à-dire déterminer si l'ouverture de milliers de courriels et de pages de documents par le contrôleur Pierre Reid et trois de ses enquêteurs était légale ou non, se déroulera ultérieurement, à une date qui n'a pas encore été fixée.