Aux prises avec un déficit de 84 millions de dollars cette année, l'administration Tremblay-Applebaum promet que la hausse du fardeau fiscal des Montréalais, en 2012, sera inférieure au taux d'inflation, qu'on établit à 2,5%. Pour y arriver, la machine municipale devra se plier à une autre opération douloureuse de compressions et de revue de ses activités.

«Le temps est venu de décider de nos priorités et de nos objectifs, a expliqué le président du comité exécutif, Michael Applebaum, lors d'un entretien avec La Presse. Le budget, c'est une chose, mais ce n'est pas le plus important. Ce sont les services, les objectifs, l'efficacité de l'administration municipale qui sont au coeur de tout. C'est de s'assurer que le client soit satisfait.»

Contrairement à la plupart de ses prédécesseurs, M. Applebaum n'est pas comptable de formation - il a surtout travaillé dans le domaine de l'immobilier. Il compare la Ville à une entreprise comme une autre, qui doit faire preuve d'efficacité et servir correctement ses «clients» pour être concurrentielle. Il a utilisé plusieurs fois ce parallèle au cours de l'entrevue d'une heure qu'il nous a accordée, hier, dans son bureau de l'hôtel de ville.

«Le maire Tremblay m'a confié le mandat de tout revoir: on en est au point où il faut se questionner sur les services qu'on donne, explique-t-il. Tout est sur la table. Qu'est-ce qui est dans notre champ de compétence? On va prendre des décisions, elles seront courageuses et pas nécessairement populaires.»

Selon les résultats financiers du premier trimestre de 2011, établis au 30 avril et dévoilés hier, la Ville de Montréal se dirige vers un déficit de 84 millions de dollars cette année. On prévoit notamment récolter 15 millions de moins que prévu en contraventions, tandis que la taxe sur l'immatriculation ne rapportera que 5 des 18 millions inscrits au budget. Le déneigement, du 1er janvier au 31 décembre 2011, devrait également engendrer un déficit de 12,7 millions.

Cette dernière somme, la Ville ira la chercher dans les surplus accumulés des arrondissements, évalués à 155 millions, annonce M. Applebaum. Quelque 60 millions seront récupérés dans les «services corporatifs», sous forme notamment de compressions qu'on a déterminées depuis l'automne dernier. «Il reste 12,5 millions. Sur un budget de 4,5 milliards, on va le trouver.»

Loyers, immigration et U2

En 2012, a rappelé M. Applebaum, tous les arrondissements devront subir un gel budgétaire, un manque à gagner évalué à 36 millions. Tous devront faire face au même dilemme: faire des compressions, se réorganiser ou trouver des sources de financement. En ce qui concerne l'administration centrale, on a déjà trouvé des pistes en vue de compressions ou, sinon, de révision des activités, annonce le président du comité exécutif.

«Nous sommes la seule ville au Québec qui aide les organismes à but non lucratif à payer leur loyer, ce qui nous coûte 5 millions par année. Nous allons diminuer la part que nous déboursons, de 17% à 12%, et abaisser les maximums de 10 000$ à 7500$. C'est 2 millions d'économies.» Autre exemple: Montréal s'occupe d'immigration et de développement social depuis des décennies. «C'est nécessaire, mais est-ce que nous recevons assez d'argent des autres ordres de gouvernement, pour ça? La cour municipale s'occupe aussi de violence conjugale. U2 vient à Montréal, c'est important, mais ça nous coûte 1,2 million. Il y a des retombées pour Québec et le fédéral, mais rien pour nous, juste des coûts.»

M. Applebaum, qui se décrit comme un gestionnaire qui ne craint pas de mettre la main à la pâte, compte revoir pendant tout le mois d'août les activités des services de l'administration municipale. Contrairement à un exercice similaire réalisé au printemps 2010, alors que directions et arrondissements avaient défilé devant la commission des finances, cette fois, c'est le président du comité exécutif qui fera ses recommandations en septembre. Pour la première fois, c'est également ce mois-là que sera déposé et approuvé le programme triennal d'immobilisation. La différence de quelques mois permettra aux projets - ils totalisent quelque 200 millions par année - d'être lancés et d'entrer dans la phase de construction plus rapidement en 2012.

Devra-t-il bousculer les arrondissements, devenir plus centralisateur pour remplir son mandat? «Ce n'est pas une question de centralisation ou de décentralisation, mais d'efficacité, rétorque-t-il. Est-ce que ça change quelque chose à la vie de monsieur et madame Tout-le-Monde que l'embauche ait été centralisée? Non, mais c'est plus efficace. Nous avons une équipe à la ville centre qui travaille au 311, nous allons réduire leur nombre, décentraliser et envoyer du personnel dans les arrondissements parce que c'est plus efficace et plus économique.»