La fraude informatique de 10 millions à la Ville de Montréal, découverte en 2008 et qui a mené au congédiement de trois fonctionnaires, continue de coûter cher. Dans une seule cause de congédiement, la Ville a dépensé jusqu'à maintenant 850 000$ en honoraires de juricomptables... alors que le premier contrat de service prévoyait un coût maximum de 50 000$.

Cette somme, versée à la firme Navigant (Leclerc Juricomptables), est confirmée par des documents soumis aux élus montréalais pour préparer la séance du conseil municipal de lundi. Elle ne concerne que les honoraires de juricomptables, pas ceux des avocats de la firme Dufresne Hébert Comeau retenue par la Ville dans cette cause.

Dans un paragraphe laconique, on évoque dans ce document «un dossier de congédiement d'un employé» sans indiquer le nom du fonctionnaire visé. On sait qu'au moins trois personnes, deux cadres et un fonctionnaire, ont été renvoyées de septembre 2008 à septembre 2009. Les noms de Gilles Parent et de son patron immédiat, Joseph Hélal, ont déjà été rendus publics. On ignore par contre l'identité du troisième fonctionnaire, dont le renvoi a été confirmé par la Ville en septembre 2009.

Explosion de coûts

Des documents ont par contre permis de suivre le gonflement graduel de la facture des honoraires de juricomptables: après une approbation initiale de 50 000$ en octobre 2008, on a accordé deux rallonges en décembre 2008 et mars 2009, pour porter la facture à 600 000$. «Compte tenu de l'ampleur des travaux qu'il reste à effectuer et des résultats obtenus jusqu'à maintenant», on a demandé de l'augmenter à 800 000$ en juin 2009. Le total a encore été gonflé de 50 000$ en mars dernier.

La somme de 850 000$ apparaît d'autant plus étonnante qu'une autre cause, plutôt complexe et plus longue, offre un point de comparaison récent. De 2004 à 2011, la contestation de l'évaluation foncière du Centre Bell, qui a nécessité 200 jours d'audition, a coûté 1,1 million en honoraires de comptables. Le litige représentait près de 6 millions par année pour la Ville.

À la Ville, le porte-parole Gonzalo Nunez explique qu' il s'agit de «travaux de vérification, d'analyse et d'enquête entamés dans le cadre des irrégularités» liées au dossier de la fraude. «Par la suite, le mandat de la firme Navigant s'est poursuivi pour du soutien aux négociations menées par la Ville auprès des firmes impliquées dans ces irrégularités», précise-t-il.

La fraude à la Division du service informatique (DSI) de la Ville de Montréal a été découverte en mai 2008, après une enquête interne, puis confiée à la Sûreté du Québec. L'ex-chef de la DSI Gilles Paren, a été accusé de fraude, d'abus de confiance, de complot et de fabrication de faux documents. Sa conférence préparatoire aura lieu le 15 juin prochain au palais de justice. On lui reproche essentiellement d'avoir monté un stratagème impliquant huit firmes informatiques qui auraient obtenu des avantages financiers indus. Deux autres fonctionnaires ont été congédiés pour des fautes de gestion. On estime que la Ville aurait perdu 10 millions dans cette affaire, dont au moins 2 auraient été recouvrés. Le mois dernier, une poursuite de 3,1 millions a par ailleurs été ratifiée contre une des firmes, Ressources systèmes informatiques (VRSI).