Le pont Champlain est victime des effets combinés d'une circulation dense, d'un camionnage intensif et de la corrosion de son armature, accélérée par les sels de déglaçage, qu'il était impossible de prévoir au moment où il fut construit, il y a presque 50 ans.

Inauguré en 1962 après 7 ans de travaux qui ont coûté 35 millions de dollars à l'époque, le pont Champlain est aujourd'hui le plus fréquenté au Canada. Presque 60 millions de véhicules le franchissent chaque année.

Alimenté par les autoroutes 10 et 15 et par la route 132, sur la Rive-Sud, il est devenu la principale porte d'entrée de Montréal et l'une des plus importantes voies de transport de marchandises entre la métropole et le nord-est des États-Unis.

Selon des données de la Société des ponts fédéraux, un peu plus de 7000 véhicules par jour empruntaient le pont Champlain en 1963, un an après son inauguration. À la fin des années 80, le nombre d'automobiles et de camions dépassait les 100 000 par jour.

Cette forte augmentation de la circulation a forcé, dès le début des années 90, la reconstruction complète du tablier du pont.

Dix ans plus tard, au tournant des années 2000, une étude réalisée par la firme d'ingénieurs Roche avait prévu que le tablier serait à refaire avant 2015 ou 2020 en raison de la croissance continue de la circulation, et en particulier du nombre élevé de camions, qui a littéralement explosé dans les années 90.

4 millions de véhicules lourds

Ces projections se sont avérées.

Selon les ingénieurs de Roche, le pont Champlain n'avait pas été conçu, à l'époque, pour supporter la circulation de 4 millions de véhicules lourds par année. De plus, on ne connaissait pas encore les effets des sels utilisés en abondance pour déglacer la chaussée.

Les piliers et poutres du pont Champlain sont faits de béton précontraint. Avec les années, le sel s'est infiltré dans la structure de béton et a fait rouiller les armatures d'acier. À son tour, la perte de volume des armatures d'acier fragilise le béton. Le passage de milliers de véhicules lourds accélère ensuite l'effritement du béton, ce qui fait en sorte d'augmenter les infiltrations d'eau et de sel à l'intérieur de la structure. Et ainsi de suite, jusqu'à ce que l'intégrité de la structure soit peu à peu compromise.

Avec une circulation estimée à 140 000 véhicules par jour, dont de 10 000 à 12 000 camions, le pont Champlain est aujourd'hui gravement usé.

En 2009, le gouvernement fédéral a adopté un plan d'entretien majeur qui prévoit des investissements d'au moins 212 millions de dollars en 10 ans afin de renforcer les têtes des piliers et les poutres ainsi que remplacer les joints du tablier. Mais ces mesures auront un effet temporaire.

En 2010, ces travaux ont tourné à maintes reprises en cauchemar pour les automobilistes, prisonniers d'embouteillages de plusieurs kilomètres de long.

Si le gouvernement fédéral opte pour la construction d'un nouveau pont, ces travaux d'entretien devront quand même se poursuivre pour garantir la sécurité des usagers en attendant la mise en service du nouvel ouvrage.

Par contre, si le gouvernement décide de prolonger la vie du pont actuel, les investissements nécessaires pour reconstruire son tablier et renforcer une partie de ses structures (poutres de soutien, piliers, etc.) seraient beaucoup plus importants encore.

De plus, les problèmes de circulation qui découleraient de ces travaux seraient amplifiés par la saturation des autres ponts de la Rive-Sud et par la perte de la voie réservée aux autobus, qui assurent chaque jour environ 40 000 déplacements entre la Rive-Sud et Montréal.

Depuis les premiers grands travaux de réfection des années 90, le trafic quotidien s'est accru de presque 40% sur le pont Champlain.