Des maires qui quittent momentanément leur poste, des fonctionnaires qui démissionnent, des élus discrédités. Les scandales de collusion et de corruption des derniers mois ont fait quelques victimes, mais il y a un hic: aucune entreprise fautive n'a été sanctionnée, dénonce la chef de Vision Montréal, Louise Harel.

Elle a demandé ce matin en point de presse qu'on inclut dans le projet de loi 109, actuellement à l'étude à Québec, des sanctions à l'égard des entreprises qui offrent des avantages indus aux élus municipaux. «Quand il y a corruption, il y a corrupteur, a souligné la chef de l'opposition. Il faut qu'il y ait une épée de Damoclès, pour que les entreprises fautives cessent d'offrir des faveurs.»

Mme Harel a donné en exemple les maires de Mascouche et Terrebonne, contraints de se retirer de leurs fonctions tandis que l'entrepreneur impliqué, Normand Trudel, fait toujours affaires avec les municipalités. Même scénario pour Garnier Construction, qui a offert un voyage en Italie à un haut fonctionnaire montréalais, qui a été contraint de démissionner en juin 2009. L'entreprise, elle, obtient toujours des contrats de la Ville de Montréal, a affirmé Mme Harel.

C'est un commissaire à l'éthique, nommé par les deux tiers de l'Assemblée nationale, qui devrait avoir le pouvoir de désigner les entreprises coupables de corruption ou de collusion. Ces entreprises seraient alors écartées de tout processus d'appel d'offres pour une durée de trois à cinq ans. Depuis un an, la Ville de Montréal interdit à toute entreprise reconnue coupable de collusion, en vertu du droit pénal, de déposer une soumission. Aucune entreprise n'a cependant encore été écartée pour ce motif.

«Cette clause, c'est un voeu pieux, elle est impraticable, estime Louise Harel. La preuve à faire est très lourde et, comme il s'agit de droit pénal, la condamnation doit être faite en dehors de tout doute raisonnable.»

Du côté de l'administration Tremblay, le vice-président du comité exécutif, Alan De Sousa, assure au contraire que les différentes mesures mises en place -comme la clause anti-collusion- ont déjà donnée des résultats. «On a élargi la compétition dans certains secteurs, un plus grand nombre de soumissionnaires. Les prix sont plus compétitifs, et on a pu réduire les montants des contrats.»

Légalement, il serait délicat d'empêcher des entreprises ou des administrateurs qui n'ont pas été reconnus coupables devant un tribunal de participer à un appel d'offres, estime-t-il. «Et c'est au procureur de la Couronne de déterminer s'il y a suffisamment de preuve pour poursuivre.»