Des «erreurs administratives» ont fait en sorte que la firme BCIA a surveillé le quartier général du Service de police de la Ville de Montréal sans contrat en bonne et due forme, a admis hier le chef Yvan Delorme. Mais son témoignage fort attendu devant la Commission de la sécurité publique laisse de nombreuses questions en suspens, selon les partis de l'opposition.

D'entrée de jeu, le chef démissionnaire a tenu à préciser qu'il n'a jamais agi de manière à favoriser la compagnie de Luigi Coretti, l'entrepreneur qu'il décrit comme une «connaissance d'affaires». Il reconnaît qu'il a «fait acte de présence» à au moins une soirée en sa compagnie.

«Ai-je été malhonnête dans les responsabilités qui m'incombent à titre de directeur du SPVM? Jamais», a-t-il affirmé.

BCIA, qui a déclaré faillite la semaine dernière, a commencé à surveiller les locaux du SPVM en 2006. Elle avait racheté le contrat de la firme Unique, qui était alors en faillite. L'entente a été prolongée jusqu'au 31 décembre 2008 en vertu d'une clause du contrat qui permettait au SPVM d'exercer une année d'option.

Mais une fois cette entente échue, il a fallu attendre des mois avant qu'un appel d'offres soit lancé. La firme qui l'a remporté, Cartier, n'a jamais honoré son contrat. Entre-temps, BCIA a continué à surveiller le quartier général sans l'approbation des élus.

«Oui, on a continué le dossier sans aller au comité exécutif, a indiqué Yvan Delorme. On l'a admis, on a fait une erreur là-dessus.»

En un an, BCIA a donc reçu 936 000$ pour ses services. Cette somme a été approuvée par des fonctionnaires du SPVM et non par des élus.

Yvan Delorme a affirmé que BCIA jouissait d'une «excellente réputation» en 2006, lorsqu'elle a hérité du contrat de surveillance du quartier général. Il n'avait donc aucune raison de se méfier.

Yvan Delorme a par ailleurs affirmé ne pas être au courant du fait que deux officiers supérieurs du SPVM, Jimmy Cacchione et Giovanni Diféo, avaient recruté des agents pour le compte de BCIA.

Des questions sans réponse

Les partis de l'opposition estiment que M. Delorme a laissé plusieurs questions sans réponse. Les journalistes aussi, d'ailleurs, puisque le chef les a évités en quittant la salle du conseil municipal par une porte latérale.

«Il y a eu des manquements graves à cause de cette culture du laisser-aller à l'hôtel de ville», a affirmé la chef de l'opposition, Louise Harel.

Le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, a souligné que le témoignage de M. Delorme n'avait en rien élucidé les raisons de sa démission- surprise au moment même où les révélations sur la firme BCIA commençaient à surgir dans les médias. Selon lui, le cafouillage qui a entouré ce contrat est la preuve qu'il faut éviter de recourir à des entreprises privées pour des activités aussi névralgiques que la surveillance des immeubles du SPVM.

«Je ne suis absolument pas satisfait de ses explications puisque, en dernière analyse, c'est la question de la confiance, a-t-il affirmé. Est-ce que M. Delorme maintient sa confiance en cette industrie représentée par BCIA ou par d'autres malgré ce qu'on a lu dans les médias et dans le rapport du vérificateur? Plusieurs fois, il a répété sa confiance.»