Un groupe de travail privé, formé d'économistes, de gens d'affaires et d'anciens mandarins du gouvernement du Québec, recommande «un grand virage» dans les structures et ordres décisionnels de la métropole afin de rendre Montréal plus fonctionnel et le gouvernement du Québec plus sensible à ses problèmes.

Dans un rapport qui risque de faire des vagues dans plusieurs ministères à Québec et chez les élus municipaux de Montréal et des banlieues, le Groupe de travail sur la gouvernance et la fiscalité a rendu publiques, hier, 33 recommandations qui visent à aider Montréal à sortir de sa «sous-performance économique».

Une dizaine de ces recommandations concernent le partage des pouvoirs et des responsabilités entre Montréal et ses 19 arrondissements. Sans chercher de coupable, les auteurs du rapport estiment que les structures mises en place à Montréal et à Longueuil après les fusions-défusions du début des années 2000 «ont fait leur temps».

Le rapport propose que les services de proximité (déneigement, collecte des déchets, parcs, bibliothèques) fournis par les arrondissements, fassent l'objet de normes précises afin d'assurer qualité égale et cohésion des actions.

Mandaté en septembre dernier par la chambre de commerce du Montréal métropolitain, le groupe de travail sur la gouvernance était présidé par l'homme d'affaires Marcel Côté et l'ancien sous-ministre des Finances Claude Séguin. Ils étaient secondés par trois ex-mandarins du gouvernement du Québec et par l'ex-ministre des Affaires municipales et de la Métropole André Boisclair.

«Nous avons été surpris, dit M. Côté, par la fragmentation des structures à Montréal par rapport à d'autres villes comparables, comme Québec et Laval. De plus, peu de gens se préoccupent de l'ensemble métropolitain. Même à Québec, on n'en voit pas. Personne, finalement, n'est responsable du tout, alors qu'on vit ensemble, dans un seul grand milieu, qui est malheureusement trop fragmenté.»

Regard sur les transports

Les investissements majeurs prévus dans les réseaux de transports en commun, estimés à 15 milliards en 10 ans, ont incité le groupe à se pencher plus particulièrement sur la gestion des transports, «marquée par l'indécision, des tiraillements et un manque d'imputabilité» de la part de Québec et du milieu municipal.

Le rapport recommande ainsi la dissolution de l'Agence métropolitaine des transports (AMT) et la prise en charge des trains de banlieue par les villes. Une nouvelle société d'État serait créée pour prendre la relève de l'AMT en matière de planification et de réalisation du réseau de transports en commun métropolitain.

De plus, le groupe recommande que le gouvernement du Québec «assume l'entière responsabilité du développement du réseau métropolitain du transport collectif» en lieu et place des multiples ordres décisionnels actuels et des intérêts conflictuels des municipalités, «qui ne sont pas capables de s'entendre», dit M. Côté.

Le rapport est encore plus critique à l'égard du gouvernement du Québec et de sa «non-organisation» face à la réalité métropolitaine.

«À Québec, dit M. Côté, il n'y a aucune conscience de ce qu'est le Montréal métropolitain. Ça n'existe pas. C'est divisé en cinq régions administratives (Montréal, Montérégie, Laval, Laurentides et Lanaudière) dont Montréal n'est qu'une partie, la plus grosse. Le reste, c'est Saint-Jovite, c'est Joliette, c'est Saint-Jérôme et Saint-Jean-sur-Richelieu.»

«On n'a pas l'impression, dit l'ancien sous-ministre des finances Claude Séguin, qu'on gère une agglomération qui se tient. Quand un ministère du Développement économique intervient, il le fait à travers cinq directions générales, alors que c'est pourtant un seul marché économique. Ça n'incite pas les gens à prendre des actions, ou à faire des politiques qui tiennent compte de l'ensemble de la région.»

Pour remédier à cela, le rapport recommande qu'un comité ministériel soit chargé d'assurer la cohérence des mesures gouvernementales qui concernent la métropole.