La nomination de conseillers de l'opposition au comité exécutif montre à quel point Gérald Tremblay a été sonné par le résultat des élections, affirment des observateurs de la scène municipale. Mais pour eux, la stratégie du maire constitue aussi un désaveu de ses propres troupes.

Malgré la grogne exprimée par des membres de son caucus au cours des derniers jours, le maire a nommé deux membres de l'opposition à son comité exécutif. Le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, et la conseillère de Vision Montréal, Lyn Thériault, ont ainsi accédé à l'équivalent du Conseil des ministres.

 

Le maire, qui s'est lui-même nommé président du comité exécutif, a par ailleurs écarté trois figures de proue d'Union Montréal, soit Claude Dauphin, Sammy Forcillo et Luis Miranda. Ces vétérans occupaient tous d'importantes fonctions dans sa dernière administration.

Pour Jean-François Léonard, politologue à l'UQAM, le message que lance le maire aux élus de sa formation est clair: «C'est un désaveu. Ça veut dire qu'il a regardé son équipe d'élus et qu'il a préféré prendre les commandes lui-même.»

Professeure de science politique à l'Université de Montréal, Laurence Bhérer estime que le maire a été sonné par le résultat des élections du 1er novembre, lui qui a été élu avec 37% des suffrages. Selon elle, la composition du comité exécutif annonce un jeu de chaises musicales qui pourrait entraîner d'importants changements dans le paysage politique montréalais.

Une opposition affaiblie?

Mais surtout, dit-elle, l'accession de M. Bergeron et de Mme Thériault au comité exécutif aura l'effet inattendu d'affaiblir l'opposition. Elle se demande comment les autres partis pourront critiquer les décisions du maire, maintenant qu'ils se trouvent dans son cercle rapproché.

«Ils se retrouvent liés aux décisions, résume-t-elle, ils ne peuvent plus les critiquer.»

Le directeur du Centre d'écologie urbaine de Montréal, Luc Rabouin, n'est pas de cet avis. Il croit plutôt que les partis de l'opposition auront beaucoup plus d'influence sur l'administration de la Ville.

«Ça leur donne un pouvoir de négociation important, le fait qu'ils soient au coeur de l'instance qui a le plus de pouvoir à Montréal, dit-il. Et éventuellement, s'ils s'aperçoivent qu'ils ne peuvent faire avancer leurs positions, ils vont partir.»

Concentration de pouvoir

Jean-François Léonard se demande comment le maire, qui a concentré énormément de pouvoirs entre ses mains, pourra s'acquitter convenablement de toutes ses tâches. Il souligne que Gérald Tremblay sera aussi maire de l'arrondissement de Ville-Marie et président du comité exécutif, en plus d'être président du conseil d'administration de la Communauté métropolitaine de Montréal et président du conseil d'agglomération, qui rassemble Montréal et les 14 villes reconstituées.

«Avec ces cinq casquettes, M. Tremblay va être très occupé à l'interne, a-t-il indiqué. On verra comment ça marche.»