Le promoteur du Quadrilatère Saint-Laurent, pierre angulaire du futur Quartier des spectacles, lance un ultimatum à la Ville de Montréal: le projet devra recevoir l'approbation des élus avant les prochaines élections municipales, faute de quoi la Main devra se passer du promoteur.

C'est un véritable cri d'alarme que le président de la société de développement Angus, Christian Yaccarini, a lancé hier au lendemain de la dernière séance de consultation publique sur le réaménagement du Quadrilatère Saint-Laurent et du 2.22 Sainte-Catherine.Christian Yaccarini n'est toujours pas parvenu à s'entendre de gré à gré avec le propriétaire du Café Cléopâtre pour le rachat de l'immeuble. Et il craint maintenant les effets de la naissance d'un mouvement en faveur de la sauvegarde de ce bar de danseuses emblématique du boulevard Saint-Laurent. Une pétition circule actuellement sur l'Internet afin de préserver les spectacles de contre-culture qui y sont aussi donnés.

Un dossier «patate chaude»

«Le danger, c'est que ça dérape et que les élus disent: ce dossier est une patate chaude, alors on va attendre après les élections pour se prononcer. Mais si on attend après les élections, il n'y a plus de projet parce que les travaux ne pourront pas commencer dans les délais prévus», a-t-il menacé hier, lors d'une conférence de presse. Les séances du conseil exécutif des mois d'octobre et de novembre seront annulées en raison du scrutin, et M. Yaccarini devrait attendre au mois de décembre avant d'être fixé. Trop tard pour entreprendre les travaux en mars 2010 comme prévu, dit-il.

Or, la SDÀ est pressée par les demandes de la société Hydro-Québec, qui a signé une lettre d'entente pour occuper le Quadrilatère à partir de 2012, à la fin de son bail dans ses locaux actuels du boulevard René-Lévesque. «Si le bâtiment n'est pas prêt en 2012, il nous faudra complètement réanalyser la faisabilité du projet», a confirmé hier le porte-parole de la société d'État, Marc Brian Chamberland.

Mais la disparition du Café Cléopâtre est loin d'être la seule source des critiques soulevées lors des consultations. La hauteur du bâtiment, son intégration dans l'architecture environnante, ses effets sur le quartier et la préservation du patrimoine se retrouvent aussi au coeur de la cinquantaine de mémoires produits dans les dernières semaines. «Ce projet aurait tout intérêt à mieux intégrer les bâtiments existants», a soulevé hier le président d'Héritage Montréal, Dinu Bumbaru, au cours d'un entretien téléphonique.

Processus long et compliqué

Christian Yaccarini réplique que les récriminations arrivent bien tard dans la mise au point du projet. «Ce n'est pas facile de mener des projets à Montréal. Les consultations arrivent en bout de piste, le processus est long et compliqué», a-t-il critiqué.

Une douzaine d'organismes étaient présents, hier, pour appuyer M. Yaccarini. «Nous avons intérêt à lui simplifier la vie», a plaidé Michel Leblanc, président et chef de la direction de la chambre de commerce du Montréal métropolitain. «Comme le projet est voisin de la tour Hydro-Québec et du complexe Desjardins, il y a quelque chose de surréaliste à ce que l'on en soit encore à remettre en question les hauteurs proposées. Nous sommes au centre-ville!»

Joint par La Presse, le responsable du dossier à la Ville de Montréal, André Lavallée, a indiqué que certaines critiques soulevées dans ce dossier étaient «surprenantes»: «On rêve de projets très positifs pour l'avenir de Montréal. Le Café Cléopâtre n'est pas un lieu d'une qualité exceptionnelle.» Il a toutefois insisté sur le fait que les consultations devaient suivre leur cours et que ce n'est qu'à la lueur des recommandations de l'Office que les élus pourront se prononcer.

Le propriétaire du bar de danseuses, John Zoumboulkakis, maintient de son côté que son établissement devrait être intégré dans le projet de M. Yaccarini et l'accuse de ne pas avoir été à l'écoute des demandes des commerçants des environs. Il nie avoir reçu une offre de 2,5 millions pour son immeuble, comme l'a affirmé M. Yaccarini.