Les «navetteurs» de Montréal et des villes de banlieue qui utilisent quotidiennement leur automobile pour aller travailler et revenir à la maison, représentent plus de 40% de tout le trafic qui traverse l'échangeur Turcot, dans le sud-ouest de Montréal.

Les voyageurs de l'heure de pointe génèrent ainsi, à eux seuls, environ 120 000 mouvements d'automobiles par jour, dans cet échangeur autoroutier que le ministère des Transports du Québec (MTQ) souhaite reconstruire «tel quel», d'ici sept ans, au coût estimé de 1,5 milliard.

Ces données ont été produites par le MTQ dans le cadre des consultations du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE) sur le mégaprojet Turcot, qui reprennent lundi prochain, à Montréal, après une suspension d'un mois.

En première ronde des audiences du BAPE le mois dernier, le MTQ a soutenu que même en apportant des améliorations aux services de transports en commun existants, le nombre des automobilistes susceptibles d'abandonner leur voiture pour voyager en autobus ou en train pourrait s'élever, au mieux, à 5800 pendant la période de pointe du matin, durant laquelle se déplacent une majorité des navetteurs.

De l'avis du MTQ, l'impact d'une réduction de près de 6000 véhicules, dans la circulation qui encombre les autoroutes et les grandes artères locales de la métropole, serait à peine perceptible, en raison de leur dispersion dans l'ensemble des réseaux routiers.

Les données sur l'ampleur du navettage risquent toutefois d'alimenter les revendications de plusieurs organismes, notamment la Ville de Montréal, qui réclament que le MTQ accorde plus de place aux transports en commun pour freiner la croissance du trafic, qui dépassera 300 000 automobiles et camions par jour dans l'échangeur, à la fin des travaux projetés, prévue pour 2016.

Tel quel

Le mois dernier, à la toute première séance publique des consultations du BAPE, le directeur du Bureau de projet du Complexe Turcot, Marc-Alain Dubé, a profité d'une question du public portant sur les transports en commun pour bien camper la position du ministère.

«Dans le cadre du projet du complexe Turcot, le gouvernement souhaite reconstruire l'échangeur tel quel, parce que c'est un ouvrage avec un capacité minimale», a déclaré le directeur de projet.

«Le Ministère, a indiqué M. Dubé, a aussi fait le choix, à l'intérieur de ce projet, ou dans la plupart de ses projets, de ne pas contraindre le transfert modal vers les transports collectifs en obstruant la circulation sur son réseau autoroutier.»

À la différence d'une autoroute, l'échangeur Turcot n'occasionne pas de circulation. Le trafic qui y transite est tributaire des trois autoroutes majeures - Décarie (A-15), du Souvenir (A-20) et Ville-Marie (A-720) - qui y convergent et qui sont reliées entre elles par 12 bretelles distinctes qui comptent chacune une ou deux voies de circulation.

M. Dubé a expliqué que diverses hypothèses avaient été explorées, à l'aide de logiciels permettant de prédire comment le trafic se redistribuerait dans l'ensemble du réseau routier, advenant la disparition d'un mouvement, ou la fermeture d'une ou de plusieurs bretelles de l'échangeur. Les effets de congestion ou de débordement se faisaient sentir jusqu'à la rue Saint-Denis, à des kilomètres de l'échangeur.

Vers un partage de la voie?

Cette position sans équivoque du MTQ heurte de plein fouet l'une des principales recommandations que la Ville de Montréal compte présenter à la commission du BAPE, dans un mémoire prévu pour le 16 juin.

Depuis plusieurs semaines, déjà, le responsable du dossier des transports à la Ville de Montréal, André Lavallée, propose publiquement la création d'un réseau de voies réservées aux autobus, aux taxis et au covoiturage, sur tout le réseau autoroutier métropolitain.

Selon les données du MTQ, le travail est le motif de déplacement de 41% des automobilistes qui empruntent quotidiennement l'échangeur Turcot. Les navetteurs représentent, de loin, le plus important des différents groupes d'usages réguliers de cette infrastructure. Les déplacements pour les «autres» motifs (affaires, magasinage, visites de famille, etc.) représentent environ le quart (24%) des véhicules qui traversent l'échangeur.

Les camions et véhicules commerciaux représentent globalement 11% du trafic quotidien observé dans l'échangeur. Plus d'un déplacement sur cinq (21%) a par ailleurs été estimé à partir de comptages routiers. Les motifs des déplacements de ces automobilistes ne sont pas connus.

Ces données permettent, enfin, de relativiser les lieux communs quant à la contribution des automobilistes des villes de banlieue à la congestion quotidienne des ponts, des grandes artères et des rues de la métropole. En effet, selon les données du MTQ, environ 45% des déplacements observés dans l'échangeur proviennent de la banlieue, ou de l'extérieur de la région métropolitaine. Pas moins de 48% des véhicules qui traversent le complexe Turcot viennent, en fait, de l'île de Montréal.

Véhicules entrant dans l'échangeur

Par catégories de motif, jour ouvrable, 2006

Mmotifs de déplacement % véhicules/jour (1)

Travail (lieu de travail habituel) 41% 118 900

Études 3% 8700

Autres motifs (affaires, magasinage, etc.) 24% 69 600

Déplacements hors enquête O.-D. 21% 60 900(2)

Véhicules légers commerciaux 3% 8700

Camions réguliers et lourds 8% 23 200

TOTAL: 100% 290 000

(1) Calculé d'après un débit journalier moyen de 290 000 véhicules par jour

(2) Déplacements estimés par comptages routiers. Le motif de déplacement n'est pas connu

Source : MTQ

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