Les organismes de défense de la montagne et du patrimoine ont porté un dur coup, hier soir, à l'ambitieux projet de transformation de l'ancien collège Marianopolis. Faisant front commun aux audiences publiques, ils ont réclamé un moratoire sur la construction de condos et de maisons dans l'ancienne propriété des sulpiciens, à flanc de montagne.

Tant les Amis de la montagne qu'Héritage Montréal sont d'avis que, dans sa forme actuelle, le projet dénaturera une portion du mont Royal. Les deux groupes estiment que le projet est «trop gros, trop dense, trop haut, pas assez vert», et que la construction projetée d'une dizaine de bâtiments, de part et d'autre de l'ancien séminaire, mettra en péril le caractère public des lieux.

 

Selon les informations obtenues par La Presse, le Centre régional de l'environnement (CRE) de Montréal enfoncera le clou davantage, cet après-midi, au cours de la ronde finale des audiences, qui se termineront la semaine prochaine, en dénonçant l'absence «d'une zone tampon de construction de 30 mètres» autour des deux bois protégés en vertu du Pacte patrimonial. Ce pacte a été négocié entre la Ville et les institutions, en l'absence des organismes de protection. Il est enchâssé dans le Plan de protection de mise en valeur du mont Royal, adopté en avril.

Dans son mémoire, que La Presse a obtenu, le CRE plaide que le projet de 300 millions de la firme privée Développement Cato inc., ne respecte pas le principe du Plan de protection sur la «capacité limite de la montagne» à accueillir de nouvelles constructions. L'organisme estime par ailleurs qu'il est impossible de construire autour des bois sans affecter les espaces verts et la biodiversité du terrain.

Hier soir, un autre élément du projet a été critiqué: l'absence de logement sociaux et abordables. Habiter Ville-Marie, un regroupement d'organismes communautaires, a rappelé que la stratégie d'inclusion de logement abordable de Montréal stipule qu'un nouveau développement de plus de 200 unités devrait idéalement comprendre 15% de logement social et 15% de logement abordable.

Un projet raisonnable

À travers cette fronde, les sulpiciens se sont portés à la défense des promoteurs en justifiant la vente et le processus qui ont mené à une demande de changement de zonage, d'institutionnel à résidentiel, à la Ville de Montréal.

Dans un mémoire étoffé de 11 pages, l'avocat représentant les sulpiciens, Jean-Pierre Morin, accompagné du procureur provincial de la communauté, Guy Charland, a insisté pour dire que Marianopolis était d'abord et avant tout une entreprise «privée».

«Prétendre que cette propriété est un bien collectif est un sophisme qu'il nous faut dénoncer, a dit Me Morin. Les exemptions de taxes municipales prévues par la loi pour les oeuvres de bienfaisance, de culte, d'enseignement et de santé ne font pas de ces propriétés des biens publics.»

En ce qui concerne les vues sur la montagne à partir de l'avenue Cedar et du chemin de la Côte-des-Neiges, au nord-ouest de la propriété, le représentant des sulpiciens a concédé «qu'une certaine densité est créée» avec la construction des bâtiments projetée, et qu'en ce sens «il y a une modification de l'ensemble de la montagne».

«Mais, a ajouté Me Morin, il faut souligner que selon les études patrimoniales, cet espace a été identifié comme constructible. N'est-ce pas le fardeau nécessaire à la préservation de deux boisés patrimoniaux?» a-t-il demandé aux commissaires de l'Office de consultation publique de Montréal (OCPM).

Le dépôt des mémoires se poursuit cet après-midi, ce soir, et deux jours la semaine prochaine.

«Non recevable», la lettre ouverte de Phyllis Lambert, à lire en page A25