Les embouteillages du pont Champlain sont devenus banals. On ne se surprend plus de patienter matin et soir entre 40 et 50 minutes pour emprunter ce pont de la Rive-Sud en période de pointe, les jours de semaine.

Mais rester pris à l'entrée du pont pendant deux heures? En pleine nuit? Le week-end?Dans la nuit du 18 au 19 octobre, des milliers d'automobilistes sont tombés dans un invraisemblable bouchon de circulation causé par les fermetures simultanées du pont Victoria, de deux voies de circulation du pont Champlain, de trois bretelles de l'échangeur Turcot et de l'autoroute Ville-Marie (A-720 Est), en direction du centre-ville de Montréal.

La combinaison de ces fermetures a obligé des milliers d'automobilistes à converger dans un immense entonnoir, formé à l'entrée de la seule voie qui était encore libre sur le pont Champlain en direction de la Rive-Sud, dans le plus important corridor de transport de Montréal. Les files d'attente sur l'A-15 et l'A-20 se sont étirées sur des kilomètres.

En plein coeur de la nuit, vers 2h du matin, il fallait compter jusqu'à deux heures pour se rendre au pont et traverser le fleuve.

Un porte-parole du MTQ a expliqué la semaine dernière que les fermetures de l'A-720, des bretelles de l'échangeur et du pont Victoria étaient programmées et qu'elles n'auraient pas dû poser de problème en soi, jusqu'à ce que la Société des ponts Jacques-Cartier et Champlain annoncent aussi des travaux «urgents» sur des piliers du pont Champlain.

À la Société des ponts Jacques-Cartier et Champlain, on affirme toutefois que les réparations avaient été programmées. Mais on ne savait pas, alors, que le pont Victoria serait aussi fermé cette nuit-là. «On l'a su vendredi, la veille. Il était beaucoup trop tard pour annuler notre chantier», a affirmé un porte-parole de la société des ponts fédéraux, Jean-Vincent Lacroix.

Les routes et les rues de Montréal sont entre bonnes mains. Beaucoup de mains, en fait. Les autoroutes sont provinciales. Trois des ponts entre Montréal et la Rive-Sud (Jacques-Cartier, Champlain et Mercier) relèvent du fédéral. Le pont Victoria est privé (il appartient au Canadien National).

En ville, les grandes voies de circulation qui composent le réseau artériel de Montréal sont sous la responsabilité de l'administration centrale de la Ville (la dite «ville centre»).

Mais ces avenues et ces grands boulevards ne représentent que 20% des rues qui quadrillent le territoire montréalais. Environ 1000 km sur 5000.

Le reste, soit 4000 km de rues locales, relève des arrondissements de la Ville de Montréal.

Il y en a 19.

Devant un si grand nombre d'intervenants, qui veillent chacun de leur côté au fonctionnement de réseaux qui sont tous interreliés, il est inévitable que des problèmes de communications finissent par surgir. On ne saura sans doute jamais l'origine précise du cafouillage qui a causé cet embouteillage de nuit.

Mais au moment où le ministère des Transports, la Ville de Montréal et le gouvernement du Québec s'apprêtent à lancer une série de mégaprojets urbains, routiers et institutionnels qui vont se chevaucher jusqu'en 2015, l'incident soulève des doutes sur les capacités communes de ces intervenants à prévenir le chaos.

Chantiers à venir

Dès l'an prochain, le MTQ prévoit mettre en chantier la reconstruction de l'échangeur Turcot, dans le sud-ouest de Montréal, et le projet de transformation de la rue Notre-Dame, l'une des artères de circulation les plus importantes dans l'est de Montréal (voir les zones ombrées sur la carte).

L'année suivante, la Ville de Montréal projette de transformer en boulevard l'autoroute Bonaventure, entre le pont Champlain et le centre-ville. Son chantier de trois ans coïnciderait en partie avec la reconstruction de bretelles qui relient l'échangeur Turcot à l'autoroute Ville-Marie. Les deux principales voies de sortie et d'entrée, à l'ouest du centre-ville, pourraient ainsi être en chantier en même temps.

Au centre-ville, la construction du nouveau CHUM pourrait raisonnablement débuter en 2010, au moment où le Quartier des spectacles sera toujours en plein chantier, à quelques rues de là.

Et alors que le nouvel hôpital sera en pleine construction, les impacts de son encombrant chantier qui paralysera en partie l'est du centre-ville vont s'ajouter à ceux de la rue Notre-Dame, transformée en autoroute encaissée jusqu'aux pieds de la rue Amherst... à quelques centaines de mètres du CHUM.