Le climat risque de s'envenimer au conseil municipal de Brossard où le maire minoritaire Jean-Marc Pelletier ne veut pas se conformer à un règlement adopté mercredi et qui permet aux journalistes audiovisuels de filmer librement les séances du conseil.

Le maire Pelletier ne veut pas que les caméramans de presse filment le public lors des périodes de question des séances du conseil. Comme les journalistes de MédiaSud, une télévision sur internet de la Rive-Sud, ne s'étaient pas conformés à sa volonté, il les avait fait expulser par la police le 8 septembre dernier.

Quelques jours plus tard, la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) a blâmé le maire pour son geste. «La transparence que les citoyens sont en droit d'exiger de la conduite des affaires municipales passe par la possibilité pour les journalistes d'en rendre compte avec les moyens techniques propres à leurs médias respectifs, a écrit le président de la FPJQ, François Bourque, au maire de Brossard. Les caméras font partie des outils de base du travail d'information. Dans les événements qu'ils couvrent, il revient aux journalistes et à eux seuls de choisir les éléments pertinents à rapporter.»

Forts de cet appui, les conseillers majoritaires de la municipalité ont adopté mercredi soir en séance spéciale un règlement qui donne toute liberté aux médias de filmer comme bon leur semble les séances du conseil municipal de Brossard. Ce règlement stipule que «les médias et professionnels de l'information peuvent filmer ou enregistrer autant les membres du conseil que les personnes du public présentes lors des séances et ce, en tout temps lors de celle-ci.»

Dorénavant, à chaque début de séance, le greffier lira un texte visant à prévenir les citoyens qu'ils sont « susceptibles d'êtres filmés » durant la séance du conseil municipal.

Le maire Jean-Marc Pelletier, qui a boycotté la séance spéciale de mercredi soir, n'a pas dit son dernier mot. À La Presse, il dit qu'il n'est pas question que les citoyens soient filmés durant les séances du conseil, règlement ou pas.

«Je vais continuer à appliquer les mêmes règles, soit que les médias télévisuels ne sont pas autorisés à filmer les gens dans l'assistance », dit le maire, même si c'est ainsi que cela se passe partout ailleurs au Québec. M. Pelletier dit qu'il tient à ce que les droits de ses citoyens «qui ne veulent pas nécessairement se retrouver sur YouTube» soient respectés. «La jurisprudence et notamment la Cour suprême du Canada a statué que les gens ont le droit à la protection de leur vie privée, dit-il. Et c'est ce qui me gouverne moi.»

La Cour suprême a effectivement décidé il y a dix ans qu'on ne pouvait diffuser une photographie prise d'un citoyen dans la rue sans son consentement. Mais est-ce la même chose pour une séance publique démocratiquement tenue dans une salle d'une municipalité alors que les citoyens présents constatent la présence des médias? Le maire Pelletier ne le sait pas mais n'en a cure : si MédiaSud filme les citoyens se présentant au micro lors de la prochaine séance du conseil municipal, le 16 octobre, il fera venir la police une nouvelle fois pour mettre la caméra dehors.

«Je suis clair là-dessus, je vais continuer à appliquer les règles que j'ai énoncées, dit-il. Et si la FPJQ n'est pas d'accord avec la décision de la Cour suprême du Canada, qu'elle la conteste à l'ONU.»