Plusieurs objets de plastique seront bannis des 8400 restaurants montréalais à compter du 28 mars, mais d’autres resteront permis, avec l’entrée en vigueur d’un règlement ayant pour objet de réduire l’utilisation des contenants et ustensiles à usage unique et d’encourager le réemploi.

« Le geste qu’on pose est courageux et va nécessiter une adaptation et un changement d’habitudes, on le sait, pour les commerçants et pour les citoyens, mais c’est absolument nécessaire de le faire parce que le principal site d’enfouissement de la région de Montréal, celui de Lachenaie, va atteindre sa pleine capacité en 2029 », souligne Marie-Andrée Mauger, responsable de l’environnement au comité exécutif de la Ville de Montréal.

Le message que la population doit retenir, selon la Ville : traînez vos tasse et bouteille réutilisables, gardez des ustensiles à votre bureau, oubliez les pailles à moins que ce soit essentiel.

Le recyclage, c’est bien, mais la réduction à la source, c’est encore mieux. Il faut d’abord éviter le problème plutôt que le gérer.

Karel Ménard, directeur du Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets.

« L’usage unique ne devrait pas exister. C’est anormal qu’aujourd’hui on puisse avoir un objet seulement quelques secondes dans nos mains et le jeter, c’est un gaspillage éhonté. »

Selon lui, les consommateurs doivent être conscients des limites du recyclage : les produits de plastique déposés dans les bacs de recyclage dans les endroits publics se retrouvent généralement dans les sites d’enfouissement, parce qu’ils sont trop contaminés par d’autres matières.

Bannis ou non ?

Le nouveau règlement municipal est quelque peu complexe, puisqu’il autorise certains objets de plastique, parfois dans certaines circonstances :

  • Tous les verres, tasses, bâtonnets et pailles de plastique sont bannis, peu importe le type de plastique.
  • Les assiettes, contenants, couvercles et barquettes de plastique sont permis, si elles sont en plastique numéro 1 à 5 (sauf les barquettes pour viande et poisson cru qui peuvent être en polystyrène).
  • Les ustensiles de plastique numéro 1 à 5 sont autorisés pour les commandes à emporter, mais ne peuvent être utilisés pour manger sur place.
  • Les tasses, verres et contenants de carton enduits de plastique (compostables ou non) sont autorisés.

Les aliments préemballés à l’extérieur de l’établissement ne sont pas visés par le règlement, qui ne s’applique pas non plus aux organismes à but non lucratif d’aide alimentaire ni aux établissements qui offrent uniquement un service de livraison à domicile, comme les traiteurs.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Marie-Andrée Mauger, responsable de l’environnement au comité exécutif de la Ville de Montréal

Les inspecteurs municipaux chargés du respect du règlement feront preuve de tolérance au début de son implantation, assure Marie-Andrée Mauger, notamment pour permettre aux commerçants d’écouler leurs stocks. Ensuite, des amendes variant entre 400 $ et 4000 $ pourront être imposées.

Un peu plus cher

Les consommateurs pourraient percevoir un léger impact sur les prix, observe Martin Vézina, vice-président aux affaires publiques de l’Association restauration Québec (ARQ), parce que les produits de remplacement sont parfois un peu plus chers.

« Mais les fournisseurs ont déjà cessé d’offrir certains produits, comme les barquettes de styromousse, parce qu’il y a aussi une réglementation fédérale qui s’en vient », note-t-il.

Antoine Meunier, propriétaire du Kamé Snack Bar, situé dans la foire alimentaire Le Central, au centre-ville de Montréal, n’avait pas encore trouvé de nouveaux verres pour servir ses smoothies, mais il étudie la question, dit-il. « Pour les pailles, je vais essayer celles en agave, qui sont plus résistantes que le carton, pour voir si elles fonctionnent avec mes produits », explique-t-il.

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Les ustensiles en bois sont déjà utilisés dans la foire alimentaire Le Central.

Au comptoir de thé aux bulles Chatime, dans le Quartier chinois, il est déjà prévu que des verres, des pailles et des couvercles de carton remplaceront le plastique dès la semaine prochaine. « On a aussi des boîtes et des plateaux de carton, on est prêts pour le changement », assure la responsable du comptoir, Ngoc Anh Tran.

Ailleurs, comme au Centre Bell, on opte pour des verres en aluminium, un produit recyclable, révèle Martin Boily, vice-président aux ventes et marketing des Emballages Carrousel, qui fournit des contenants à plusieurs restaurants de Montréal.

D’autres, comme des festivals de musique, envisagent plutôt de fournir des verres réutilisables, avec une consigne et des stations de lavage sur place, ajoute M. Boily.

« On sent qu’il y a une augmentation de la demande pour les lave-vaisselle et la vaisselle réutilisable », dit-il, notant que ce modèle a déjà été adopté par des cafés depuis quelques années avec le réseau La Tasse.

La Ville a offert un soutien financier de près de 100 000 $ pour le développement d’un réseau de contenants réutilisables pour les commandes de nourriture à emporter, en collaboration avec la Table de concertation du réutilisable en restauration, et un soutien financier de 82 000 $ à La Vague, gestionnaire du réseau La Tasse, pour accompagner des commerçants dans l’adoption de solutions de rechange réutilisables au plastique à usage unique.

En savoir plus
  • 20 000 tonnes
    Quantité de matières qui seront éliminées grâce au nouveau règlement chaque année
    Source : Ville de Montréal
  • 930 000 tonnes
    Quantité de matières résiduelles générées dans l’agglomération de Montréal en 2018 ; 47 % sont récupérées
    Source : Ville de Montréal