Les repas de la compagnie ferroviaire allemande Deutsche Bahn sont dorénavant servis dans de la vaisselle réutilisable, une initiative pour atteindre la carboneutralité d’ici 2040. Si l’Allemagne a pris les devants dans la gestion de ses matières résiduelles, le Québec tarde quant à lui à établir des pistes d’action.

Deutsche Bahn a pris le virage vert en restauration pour bien commencer l’année 2023 : les voyageurs à bord des trains interurbains de l’entreprise publique peuvent grignoter ou boire dans de la vaisselle en céramique et en verre.

Avant, l’option durable était seulement offerte en première classe ou dans la voiture-restaurant, explique dans un courriel la Deutsche Bahn. Mais depuis le 1er janvier, l’Allemagne oblige tous les restaurateurs à proposer des emballages réutilisables pour les produits à emporter.

Dans les trains, « la version réutilisable est gratuite, sans consigne, et offerte sur demande au bistrot à bord, pour toutes commandes », précise Deutsche Bahn.

La compagnie ferroviaire allemande s’efforce de mettre à la disposition de ses clients différentes solutions durables à bord. Pas moins de 50 % des plats offerts dans les trains sont végétariens ou végétaliens, depuis mars dernier. On retrouve également sur le menu des repas 100 % bios.

PHOTO OLIVER LANG, FOURNIE PAR DEUTSCHE BAHN AG

La vaisselle en céramique est utilisée pour éviter les déchets qui s’accumulent.

« La Deutsche Bahn poursuit sa transformation verte dans la restauration à bord. [...] Nous offrons à nos clients non seulement une [solution de rechange] durable à l’emballage jetable, mais nous créons également un plaisir de qualité comme à la maison », a fait savoir Michael Peterson, directeur du transport des passagers à longue distance de la compagnie, cité dans un communiqué.

Le Québec à reculons 

Au Québec, « on pourrait s’attendre à des changements en ce sens au courant des prochaines années, mais ça tarde à se passer », estime Amélie Côté, analyste en réduction à la source chez Équiterre. Elle a plutôt remarqué un recul quant à la gestion des matières résiduelles depuis la pandémie.

Le réseau ferroviaire canadien ne prendra pas le virage de la Deutsche Bahn de sitôt. En décembre dernier, sur un trajet vers Toronto à bord d’un train VIA Rail, on a refusé à Amélie Côté de remplir sa tasse réutilisable de thé, raconte-t-elle.

« Même si bon nombre des politiques liées à la COVID-19 qui avaient été mises en œuvre pendant la pandémie ont été levées, certains agents pourraient se sentir mal à l’aise de réutiliser les effets personnels fournis par les passagers », a écrit la société d’État en réponse à la plainte déposée par Amélie Côté.

Actuellement, seulement les repas en classe Affaires, Prestige et Voiture-lit sont servis avec de la vaisselle réutilisable, confirme VIA Rail par courriel à La Presse. « Nous ne prévoyons pas utiliser de la vaisselle réutilisable pour tous les autres repas et produits servis en classe Économie considérant les contraintes d’espace », a écrit la société d’État.  

Or, dans son plan de développement durable lancé en 2021, VIA Rail Canada prévoit d’instaurer un « train zéro déchet » entre Québec et Windsor, accroître de 60 % son recyclage et collecter les déchets compostables « dans les sites prioritaires » d’ici 2025.

Toujours selon le rapport, VIA Rail Canada dit vouloir « renforcer les cibles de réduction des GES pour soutenir l’ambition de carboneutralité d’ici 2050 ».

« Le réutilisable devrait toujours être la solution qui est priorisée quand on veut réduire notre empreinte environnementale et la quantité de matière résiduelle générée », ajoute Amélie Côté.

Selon elle, le Québec demeure un « grand générateur de déchets ». Le gouvernement s’était donné comme objectif 525 kg de matières résiduelles éliminées par habitant d’ici 2023, une mission que la commission d’enquête a finalement qualifiée d’« improbable ».

Pas moins de 9 des 38 lieux d’enfouissement technique (LET) du Québec « devraient avoir atteint la capacité maximale autorisée » d’ici 2030, indique le rapport du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), publié en janvier 2022. Si la tendance se maintient, 13 lieux supplémentaires pourraient s’ajouter à la liste d’ici 2041.

« Il suffit de volonté, parce que les solutions existent », juge Amélie Côté.

Un casse-tête pour les compagnies aériennes 

Peut-être avez-vous déjà mangé avec des couverts en bambou, à bord d’un avion ? C’est ce que la compagnie aérienne Air Transat propose pour réduire son empreinte écologique. Ces couverts en bambou, certifiés Forest Stewardship Council, « proviennent de forêts gérées de manière responsable qui offrent des avantages environnementaux, sociaux et économiques », promet l’ONG internationale.

« La vaisselle en porcelaine est une option certainement intéressante pour un transporteur ferroviaire, mais beaucoup moins pertinente pour un transporteur aérien, car son poids lui confère une empreinte carbone plus élevée », explique Bernard Côté, directeur, marketing, relations publiques et médias sociaux, d’Air Transat.

La gestion des déchets est un défi constant pour l’industrie aérienne, vu les « réglementations asymétriques » d’un pays à l’autre. La législation internationale sur les déchets de restauration impose « souvent » l’enfouissement et l’incinération des emballages recyclables ou compostables, avoue-t-il.

Bernard Côté assure que la compagnie aérienne canadienne donne la priorité à des produits ayant un impact environnemental minimal, tout en se conformant aux exigences de l’industrie aérienne. D’ici l’été 2023, les boissons des voyageurs qui volent avec Air Transat seront servies dans des verres en carton – recyclables, mais pas réutilisables.

Rectificatif : une version précédente indiquait que le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) s’était donné comme objectif 525 kg de matières résiduelles éliminées par habitant d’ici 2023. Il s'agit plutôt de l'objectif du gouvernement du Québec.

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