(Québec) Le gouvernement Legault minimise le rejet par les citoyens de Rouyn-Noranda du projet de nouvelle norme d’arsenic dans l’air, puisque la norme est « un élément parmi tant d’autres ».

En mêlée de presse mercredi matin à Québec, le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, a ainsi commenté le résultat des consultations publiques tenues sur les rejets de la fonderie Horne.

L’usine de la multinationale Glencore est au centre d’une controverse depuis des mois puisqu’elle émet des rejets d’arsenic 30 fois plus élevés que la norme québécoise et la Santé publique reconnaît depuis longtemps les risques associés à cet élément chimique.

Le rapport des consultations publié mardi révèle que les citoyens de cette ville d’Abitibi-Témiscamingue s’opposent à 58 % à une proposition qui abaisserait la limite de concentration d’arsenic dans l’air à 15 nanogrammes (ng) par mètre cube.

L’usine a actuellement le droit d’émettre jusqu’à 100 nanogrammes d’arsenic par mètre cube, alors que la norme est de 3 nanogrammes ailleurs au Québec. L’autorisation a été reconduite pour cinq ans en 2017 et est en cours de renouvellement, de là les consultations et le débat.

L’entreprise propose un plan pour réduire ses émissions au plafond de 15 ng par mètre cube d’ici à cinq ans, mais c’est donc encore trop élevé pour trois répondants sur cinq.

M. Charette a refusé de discuter avant janvier des modalités de l’autorisation qu’il doit délivrer à la fonderie.

« Pour ce qui est des modalités de l’autorisation, on va s’en reparler en janvier, parce que le 15 nanogrammes est un élément parmi tant d’autres », a-t-il expliqué avant de se rendre à la séance du conseil des ministres.

« Je sais que c’est l’élément qui retient davantage l’attention, mais c’est un élément parmi tant d’autres. »

Le ministre a précisé que « bien sûr qu’on est à l’écoute des gens de Rouyn-Noranda ».

L’attestation a été délivrée à Glencore par une fonctionnaire du ministère de l’Environnement, le 20 novembre 2017 et doit donc être renouvelée après cinq ans.

Le plan de réduction sur cinq ans de l’entreprise a provoqué une levée de boucliers et une mobilisation.

Ce plan « ne permet pas de croire que la santé de gens de Rouyn-Noranda, des femmes enceintes, des bébés, sera protégée durant les cinq prochaines années », avait déclaré cet automne le Dr Frédéric Bonin, du groupe Impact (Initiative médicale pour une action contre la toxicité environnementale).

Selon la santé publique, le seuil de 15 ng constitue une « cible intermédiaire » acceptable seulement si d’autres concentrations de contaminants (plomb, cadmium) sont réduites, avait-il soulevé.

En campagne électorale, le chef caquiste François Legault avait évoqué la tenue d’un référendum à Rouyn-Noranda sur la fermeture ou non de la fonderie.

La Direction de la santé publique reconnaît que cela pose un « risque pour la santé ». Toutefois, appliquer maintenant la norme québécoise signifie la fermeture de l’usine, avait menacé M. Legault.

Il avait repris l’argument de l’entreprise voulant qu’elle ne pourrait atteindre techniquement la norme québécoise.

« Il faut arrêter d’essayer de tordre les données, avait dit M. Legault à la radio. À 15 nanogrammes (par mètre cube), la santé publique dit que les risques sont minimes. C’est un niveau acceptable. »

Dans un récent rapport, des scientifiques de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) écrivaient que « les émissions historiques d’arsenic et de cadmium de la Fonderie Horne sont associées à un risque estimé accru de cancer dépassant le seuil de risque considéré comme négligeable au Québec ».

Dès 2004, un rapport d’un groupe de travail de l’INSPQ et du ministère de l’Environnement affirmait : « étant donné le caractère cancérigène de l’arsenic, le groupe de travail estime qu’il est nécessaire d’adopter une approche préventive visant à réduire le plus possible les niveaux d’exposition de la population. »

L’arsenic peut entraîner des retards de croissance et dans le quotient intellectuel, ainsi que des troubles neurodéveloppementaux, avait indiqué le Dr Bonin.

Glencore pourrait réduire des deux tiers ses émissions actuelles d’arsenic seulement en modifiant 5 % de ses intrants, c’est-à-dire les produits qu’elle utilise dans son procédé, a soulevé le médecin.

La fonderie de la multinationale Glencore emploie 650 personnes.

Note aux lecteurs : Dans une version précédente, La Presse Canadienne écrivait que le ministre Benoit Charette avait commenté la norme de nickel dans l’air à Rouyn-Noranda. En fait, il parlait de la norme d’arsenic.