Aux voyageurs frustrés par les délais de l’industrie aérienne, mais qui détestent les trajets longue distance en autocar traditionnel, de jeunes pousses américaines proposent maintenant une autre voie : des bus de luxe. Ces autocars pourraient-ils bientôt rouler sur les routes canadiennes et réduire l’empreinte carbone de ceux qui prennent normalement l’avion ?

The Jet offre « une expérience de voyage de première classe, qui combine le luxe et l’espace personnel d’un jet privé avec l’abordabilité et la commodité d’un autocar », indique son site web.

Ses larges sièges peuvent s’incliner à 45 degrés et neutralisent les vibrations de la route, dit-on. Le WiFi et un service de boissons sont offerts à bord, où l’on trouve aussi des toilettes « censées ressembler davantage à celles d’un hôtel de luxe qu’à celles d’un autocar ». L’entreprise vend jusqu’à 14 places par départ, au coût de 99 $ US à 199 $ US (de 135 $ CAN à 271 $ CAN) pour un aller simple entre les villes de New York et Washington, un trajet d’environ 370 km.

PHOTO FOURNIE PAR NAPAWAY

Les autocars-lits haut de gamme de Napaway proposent des trajets de nuit confortables et pratiques.

Napaway se décrit quant à elle comme « un nouveau type de service d’autocars-lits haut de gamme qui propose des trajets de nuit confortables et pratiques » d’environ 12 heures entre Nashville, au Tennessee, et Washington DC à partir de 125 $ US (170 $  CAN). Ses autocars peuvent accueillir 18 passagers disposant chacun de deux sièges, qui peuvent être inclinés pour former une couchette. Le WiFi et une « trousse de sieste » incluant masque, bouchons d’oreilles et brosse à dents, notamment, sont offerts à bord.

D’autres entreprises, comme Vonlane et Red Coach, proposent de longs trajets entre des villes de la Floride ou du Texas, par exemple. Leurs autocars sont aussi équipés de moins de sièges qu’un véhicule standard, mais ceux-ci sont plus larges et peuvent s’incliner davantage.

Peu de bus luxueux au Canada

« À ma connaissance, aucun transporteur n’occupe cette niche au Canada », dit la professeure Fanny Tremblay-Racicot, experte du transport urbain. « Les entreprises comme Intercar, Orléans et Megabus sont plutôt conventionnelles et n’offrent pas d’expérience que nous pouvons qualifier de luxueuse », explique-t-elle.

Le train s’y apparente davantage, mais « il y a très peu de liaisons offertes par VIA Rail », observe-t-elle, tandis que « la desserte aérienne est limitée et extrêmement onéreuse ».

Dans ce contexte, les autocars de luxe « pourraient aller chercher des usagers qui voyagent par train ou par avion, en plus de répondre à une certaine demande latente à la recherche de ce genre de service », selon la professeure Tremblay-Racicot, qui enseigne à l’École nationale d’administration publique.

« Est-ce que certains corridors pourraient être rentables [au Canada] ? C’est possible, mais les cas américains montrent que c’est difficile », croit-elle.

En fait, il existe au moins un transporteur du genre au pays, Red Arrow, qui offre des trajets entre Calgary, Edmonton et d’autres villes albertaines seulement. Leurs autocars comptent 36 larges sièges inclinables et on y sert collations et rafraîchissements.

Plus écolo ?

Plus confortable que l’autocar traditionnel et moins chère que l’avion, cette nouvelle offre se présente également comme un compromis environnemental. « L’empreinte carbone de Napaway est inférieure à la moitié du vol sur la même distance dans un avion typique », indique le transporteur sur son site web.

PHOTO FOURNIE PAR THE JET

Autocar exploité par The Jet

« Il est assez bien établi qu’un bus interurbain est la forme de transport en commun la plus verte », dit le président-directeur général de The Jet, Rob Thorpe, citant l’équivalent d’environ 1,6 litre d’essence par passager pour 100 km en autocar, comparativement à 4,7 en train ou à 5,6 en avion. « Avec moins de sièges qu’un bus traditionnel, The Jet ne peut prétendre être aussi écologique qu’un opérateur standard », concède-t-il, mais il estime néanmoins atteindre environ 3,4 litres d’essence pour 100 km.

« C’est forcément une bonne chose pour les émissions [de gaz à effet de serre], si ces autobus sont remplis », confirme l’expert en politiques énergétiques et professeur à HEC Montréal Pierre-Olivier Pineau.

« C’est une excellente idée et une bonne approche pour faire du transport collectif plus efficace, ajoute-t-il. Ça permettrait de rendre les transports en commun plus attrayants pour une clientèle qui rechigne à perdre le confort de son véhicule pour les transports en commun traditionnels. »

PHOTO DAVID BISHOP, FOURNIE PAR THE JET

Des services de haut de gamme sont offerts dans les autocars de The Jet.

Peut-on s’attendre à voir ce type de service chez nous bientôt ? « En tant que jeune pousse qui approche à peine de son premier anniversaire, nous savons que les prochaines années verront une expansion régionale de notre offre dans le corridor nord-est, répond M. Thorpe, de The Jet. Ce serait formidable d’offrir le service pour les voyages interurbains au Canada, et j’espère que nous y parviendrons un jour. »

Même son de cloche du côté de Napaway. « Nous espérons étendre nos services au Canada, bien qu’il n’y ait pas encore de calendrier précis, dit le chef de la direction, Daniel Aronov. Nous allons probablement nous concentrer sur les trajets transfrontaliers. »

Les entreprises de transport interurbain par autocar déjà actives au Canada jointes par La Presse n’avaient pas offert de réponses à ce sujet au moment d’écrire ces lignes.

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