(Québec) Le Parti québécois presse le gouvernement Legault d’utiliser son plan de relance économique, qui sera nécessaire après la pandémie de COVID-19, pour effectuer un important virage vert. Pour y arriver, Québec devrait utiliser jusqu’à 1 milliard par année du Fonds des générations pour l’investir dans un nouveau fonds destiné à une transition écologique « juste ».

Dans une entrevue conjointe effectuée avec La Presse, la première depuis la fin de la campagne à la direction du Parti québécois (PQ), le nouveau chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon et l’ex-candidat à la direction Sylvain Gaudreault mettent la table de ce qui deviendra, d’ici les élections de 2022, la « pierre angulaire » de leur vision économique.

Mais avant, Québec déposera le 25 mars son budget, très attendu après un an de pandémie. Les deux péquistes martèlent que le gouvernement a devant lui une « fenêtre historique » pour donner « une base durable » à l’économie, en appuyant à fond sur une transition vers des technologies propres.

Aux États-Unis, affirme M. St-Pierre Plamondon, Joe Biden y va d’un plan de relance de près de 2000 milliards de dollars. « Les États-Unis n’attendront pas, ils prennent le virage [vert] maintenant. […] C’est aussi une occasion incroyable pour les entreprises québécoises », dit-il.

N’oublier personne

Au téléphone depuis sa circonscription de Jonquière, à Saguenay, le député Sylvain Gaudreault propose de créer « un Fonds de transition juste » qui aurait entre autres pour objectif « de soutenir la transition économique vers des emplois durables grâce à de la formation qualifiante pour les travailleurs touchés ».

« Ce qui est le plus important dans la transition économique et écologique, c’est de s’assurer que personne n’est laissé de côté. Pour éviter les fractures sociales et la polarisation, il faut une transition juste », dit-il. Selon la Fédération des travailleurs et des travailleuses du Québec (FTQ), cite M. Gaudreault, « entre 400 000 et 700 000 travailleurs pourraient être touchés par une transition de leur emploi ».

Selon le PQ, le Fonds des générations — dont le mandat est de réduire le fardeau de la dette du Québec — est en bonne santé et remplit son objectif. En puisant jusqu’à 1 milliard par année pour financer un virage vert, « le fonds va [aussi] servir à soutenir la transition vers une économie durable qui servira les prochaines générations », affirme le député de Jonquière.

Miser sur des « gazelles »

Paul St-Pierre Plamondon renchérit à ce sujet. Selon lui, le Fonds pour une transition juste doit aussi permettre à Québec de financer la création « d’un programme de gazelles [de jeunes entreprises à fort potentiel de croissance] pour qu’elles deviennent des joueurs importants » dans l’économie mondiale.

Selon le chef péquiste, l’État québécois a tout intérêt à assurer le positionnement de ces entreprises installées au Québec qui s’investissent dans les énergies renouvelables. Le programme qu’il souhaite voir créé, ajoute-t-il, doit avoir trois conditions : s’engager à ne pas utiliser de paradis fiscaux, maintenir une masse salariale qui ne dépasse pas un certain pourcentage (toujours pas défini) de la masse salariale totale de l’entreprise et maintenir le siège social de l’entreprise au Québec pour au moins 25 ans.

« Chaque dollar investi dans des gazelles et des entreprises d’avenir va redonner à l’État beaucoup plus que le rendement qu’on fait en ce moment » dans le Fonds des générations, estime M. St-Pierre Plamondon.

Verdissement des villes

Sylvain Gaudeault presse également le gouvernement de consentir 1 % des investissements annuels au infrastructures publiques dans le verdissement des villes. Selon lui, le Québec doit presser le pas pour accroître les sommes qu’il met dans les infrastructures vertes, mais aussi pour de meilleurs traitements des eaux usées.

Selon Paul St-Pierre Plamondon, la seule façon pour que la population suive l’État dans son virage vert, c’est s’il est lui aussi exemplaire en la matière. Il souhaite que le Québec se dote de politiques publiques d’achats verts, d’investissements dans l’économie renouvelable et que la Loi visant l’augmentation du nombre de véhicules automobiles zéro émission au Québec soit renforcée, pour que le consommateur ait éventuellement « plus d’argent dans ses poches quand il achète une technologie verte par rapport aux anciennes technologies » polluantes.

« Ce qu’on voit en ce moment, c’est l’appauvrissement des ménages québécois au profit des cartels pétroliers. Les Québécois dépensent des milliers de dollars qui vont directement en profit aux pétrolières, alors qu’on pourrait faire le plein d’électricité et qu’on mettrait beaucoup d’argent dans les poches des Québécois », affirme le chef péquiste.

« Lorsqu’on vend de l’électricité pour nos déplacements, c’est Hydro-Québec, c’est donc [la collectivité] qui s’enrichit », conclut-il.