(Glasgow) Avant d’être élu premier ministre, François Legault disait qu’il allait installer un compteur sur son bureau pour dénombrer les emplois qu’il allait créer.

Maintenant il compte les tonnes de gaz à effet de serre (GES) qu’il arrive à soustraire du bilan du Québec. Il dit qu’il a évolué sur l’enjeu de l’environnement.

Le décompte des trois derniers jours est une réduction de presque 5,4 millions de tonnes de pollution atmosphérique par an – sur les 80 millions de tonnes émises par le Québec chaque année.

Mais alors que tous les pays sont appelés par l’ONU à renforcer leurs cibles de réduction d’émissions polluantes pour limiter le réchauffement de la planète, le Québec n’a pas présenté durant cette COP26 une nouvelle cible de réduction plus exigeante que celle de 37,5 % pour 2030.

Le Québec n’a pas non plus réussi à annoncer, malgré les appels répétés de M. Legault, de nouveaux États partenaires pour sa bourse du carbone, son marché d’échange et de limitation des émissions de GES avec la Californie.

À sa première participation à titre de premier ministre à la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP26), François Legault s’est affairé tout autant à chiffrer les investissements d’entreprises au Québec qu’à calculer la baisse des émissions de GES, pour atteindre les cibles de réduction fixées pour 2030 et la suite.

Au cours des trois derniers jours de sa mission, de mardi à jeudi, il a annoncé des engagements qui, à terme, représentent donc une baisse potentielle des émissions du Québec de près de 5,4 millions de tonnes de GES par an.

En conférence de presse pour faire le bilan de sa mission, il a dit avoir changé, depuis le temps où aux élections de 2018 son parti présentait le programme le plus modeste en environnement.

« J’ai évolué »

« J’ai évolué », a-t-il affirmé dans une des salles de l’immense complexe qui accueille la COP à Glasgow.

« On a développé de nouveaux secteurs, on va, en même temps que réduire les GES, créer de nouvelles industries, comme les autobus électriques, comme les trains, l’hydrogène vert, comme les batteries. Là-dessus, j’ai évolué. Plus de richesse, moins de GES. C’est ça que j’ai réalisé. Plus que jamais, il y a un coût, mais aussi une occasion d’affaires extraordinaire. »

Jeudi, il s’est joint à une annonce des alumineries Alcoa et Rio Tinto sur une nouvelle technologie qui, si elle était adoptée par toutes les usines au Québec, réduirait de 5 millions de tonnes par an les émissions de GES.

Il a aussi annoncé que la distillerie Diageo, de Salaberry-de-Valleyfield, qui produit notamment le Crown Royal, allait investir, avec les gouvernements, un total de 94 millions pour réduire de 40 000 tonnes par année les émissions de GES. Cela équivaut à éliminer la consommation d’environ 21 000 000 mètres cubes de gaz naturel et 1500 litres de mazout lourd.

Auparavant, il avait annoncé qu’un nouveau procédé à l’usine de fer d’Arcelor Mittal à Port-Cartier allait aussi réduire de 200 000 tonnes par an les émissions.

Il a également annoncé 5 milliards pour l’achat d’autobus urbains électriques, ce qui permettra d’éliminer à terme environ 131 500 tonnes de gaz à effet de serre par an.

Bourse du carbone

Dans l’ensemble, pour cette COP, le gouvernement Legault a donc particulièrement ciblé l’industrie, qui représente environ 30 % des 80 mégatonnes d’émissions du Québec.

Jeudi, le premier ministre a de nouveau appelé les autres provinces ou États américains à se joindre à la bourse du carbone : un moyen « efficace » de réduire les émissions des grands pollueurs industriels en tarifant le prix de la tonne de carbone.

Malgré les efforts du Québec, l’Ontario a refusé de s’y joindre, le Manitoba aussi. Donc les concurrents des entreprises québécoises n’ont pas à payer pour leurs émissions polluantes.

« C’est important que le Québec et la Californie ne restent pas seuls dans la bourse du carbone. C’est important que nos entreprises ne soient pas les seules, avec celles de la Californie, à avoir une responsabilité sociale de réduire les GES. »

Il y voit une concurrence déloyale. Il réclame que les États-Unis, voisins et concurrents du Québec, mettent aussi un prix sur le carbone émis par leurs entreprises.

Transport routier

Enfin, le premier ministre n’a pas annoncé de nouvelles mesures de grande envergure pour réduire l’empreinte du transport routier dans le bilan des GES du Québec.

Les 5 milliards pour acheter 2148 autobus électriques représentent une enveloppe considérable, mais il est estimé que la mesure va réduire les émissions de 131 500 tonnes par an : c’est d’un poids relatif sur les 28,7 millions de tonnes de GES émises par le transport routier dans le bilan annuel du Québec.

À sa décharge, le gouvernement mise sur 55 milliards annoncés pour des projets de trains légers, tramways, etc.

Le transport est un des deux secteurs, avec l’industrie, où le Québec « peut en faire plus », a reconnu le premier ministre.

Les oppositions espéraient qu’il annonce l’abandon de son coûteux projet de tunnel Québec-Lévis, le troisième lien estimé à plus de 10 milliards, mais le premier ministre a répété qu’il s’agit de la solution à un problème de circulation.