(Glasgow) « Si Glasgow échoue, tout échoue ». Au sortir d’un G20 qui a déçu jusqu’au patron de l’ONU concernant la lutte contre le changement climatique, l’hôte de la cruciale COP26 démarrée dimanche en Écosse a lancé un avertissement solennel.

« Nous avons fait des progrès au G20 […], mais ce n’est pas assez », a alerté le premier ministre britannique Boris Johnson depuis Rome, où se tenait une réunion des 20 pays les plus riches de la planète.

Car si les pays du G20 n’arriveront pas les mains totalement vides à la conférence de Glasgow sur le climat, les engagements sur lesquels ils se sont entendus dimanche à Rome en ont laissé beaucoup sur leur faim.

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Les pays du G20 se sont entendus pour arrêter cette année de subventionner de nouveaux projets de centrales électriques au charbon à l’étranger.

« Je salue l’engagement renouvelé du G20 en faveur de solutions au niveau mondial, mais je quitte Rome avec des espoirs déçus – même s’ils ne sont pas enterrés », a déclaré sur Twitter le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres.

Comme de nombreux dirigeants mondiaux, il se rendait ensuite en Écosse pour la COP26, une réunion de deux semaines considérée comme cruciale pour l’avenir de l’humanité. Après une ouverture formelle dimanche, elle sera vraiment lancée lundi et mardi par un sommet.

Grands absents

Plus de 120 chefs d’État et de gouvernement sont attendus, dont l’Américain Joe Biden, le Français Emmanuel Macron, l’Indien Narendra Modi et même l’Australien Scott Morrison, ardent promoteur du charbon dont son pays est le premier exportateur mondial.

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Les leaders de G20 sont réunis à Rome.

Mais il y aura aussi de grands absents, comme le Chinois Xi Jinping qui n’est pas sorti de son pays depuis le début de la pandémie de COVID-19. La Chine, premier émetteur de gaz à effet de serre, vient de présenter de nouveaux objectifs de réduction considérés par beaucoup d’experts comme manquant d’ambition.

Vladimir Poutine, président de la Russie, autre grand pays pollueur, comme le Brésilien Jair Bolsonaro, accusé de favoriser une déforestation massive en Amazonie, seront aussi absents.

« Si le G20 était une répétition générale pour la COP26, alors les leaders mondiaux ont raté leur réplique », a regretté Jennifer Morgan, directrice exécutive de Greenpeace International. Et de promettre qu’à Glasgow, où de nombreux militants s’apprêtent à manifester, « nous exigerons les actions manquantes pour protéger de la crise climatique comme de la COVID-19 ».

« Tout ce que nous avons vu (au G20), c’était des demi-mesures plus que des actions concrètes », a renchéri Friederike Röder, vice-présidente de Global Citizen.

« Nous devons avoir en tête que ce n’est que le début », a défendu le premier ministre italien Mario Draghi, dont le pays présidait le G20 cette année, « nous allons pas à pas ».

Joe Biden a affirmé qu’il y avait eu des « résultats tangibles », tout en se disant « déçu » que la Chine et la Russie ne se soient pas « montrées » au sommet.

La chancelière allemande sortante Angela Merkel a quant à elle estimé que la réunion du G20 constituait « un bon signal avant Glasgow ».

Les décisions du G20 sur le climat étaient d’autant plus attendues que ce groupe, qui réunit les principales économies développées (UE, États-Unis) mais aussi de grands émergents comme la Chine, la Russie, l’Inde ou le Brésil, représente 80 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

Glasgow sera « le dernier et le meilleur espoir » de parvenir à limiter le réchauffement de la planète à +1,5 °C, objectif le plus ambitieux de l’Accord de Paris, a prévenu dimanche en ouvrant la conférence Alok Sharma, président de la COP26. Et les leaders mondiaux peuvent « faire le succès ou enterrer l’espoir de garder l’objectif de à “1,5 °C à portée ».  

« L’humanité est face à des choix difficiles, mais clairs », a renchéri la responsable climat de l’ONU, Patricia Espinosa.

Terrain inconnu

Le communiqué final du G20 a bien réaffirmé les objectifs de Paris, tout en insistant sur le fait que « conserver (l’objectif de) 1,5 °C à portée nécessitera des actions et des engagements significatifs et efficaces de tous les pays ».

Or ce sont bien les engagements précis qui manquent, comme sur le charbon, grosse source de pollution carbone, sur lequel le G20 n’a pas donné d’objectifs nationaux. Beaucoup de pays, notamment émergents, restent très dépendants de cette source pour leur production électrique, a fortiori dans le contexte actuel de crise énergétique mondiale.

Pas de date précise non plus pour atteindre la neutralité carbone. Le G20 évoque seulement le « milieu du siècle ». Un horizon moins précis que l’horizon de 2050 voulu notamment par la présidence italienne du G20.

Déception aussi sur un autre dossier brûlant de la COP, l’aide climatique aux pays pauvres. L’engagement des plus riches de 100 milliards de dollars par an à partir de 2020 ne sera pas tenu… avant 2023.

Pourtant, les effets de la crise climatique se font toujours plus sentir, sécheresses, canicules mortelles, méga-feux, inondations… Et les pauvres sont souvent en première ligne.

L’Organisation météorologique mondiale (OMM) a ajouté dimanche une page au dossier, annonçant que les sept années de 2015 à 2021 seront probablement les plus chaudes jamais enregistrées, et prévenant que le climat mondial entrait en « terrain inconnu ».