(Montréal) Les chefs des trois partis d’opposition à Québec ont unanimement dénoncé le laisser-faire dans le secteur forestier aux assises annuelles de l’Union des municipalités du Québec (UMQ), vendredi.

Invités à s’adresser aux élus municipaux, la cheffe libérale Dominique Anglade, la co-cheffe de Québec solidaire, Manon Massé, et le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon ont fait part de leurs positions dans les dossiers de l’heure à l’UMQ, notamment la fiscalité municipale, les changements climatiques, le manque de logements et le transport en commun pour ne nommer que ceux-là.

Les trois chefs se sont toutefois rejoints lorsqu’il a été question de l’industrie forestière, dénonçant une piètre gestion de la ressource et l’impact direct sur les Québécois de cette mauvaise gestion, des reproches qui ne sont pas sans rappeler ceux de l’agronome Louis Robert envers le ministère de l’Agriculture, qu’il accusait de laisser la gestion des pesticides aux producteurs, distributeurs et utilisateurs de ces produits.

« Situation absurde »

« En ce moment, parce qu’on gère mal nos forêts, on a des problèmes d’approvisionnement, a pesté le chef péquiste. On a encore des coupes irresponsables qui se font, parfois dans des terres qui appartiennent à l’État, donc tout ce qui appartient à l’État en ce moment est mal réglementé et on se retrouve dans la situation absurde où il y a une pénurie, il y a une bulle immobilière parce qu’on ne construit pas assez de maisons et le bois coûte trois fois plus cher parce qu’on envoie tout notre bois aux États-Unis. »

Paul St-Pierre Plamondon a ajouté que le Québec « a des enjeux de gouvernance dans l’industrie et dans le ministère qui gère nos forêts. Il y a un ménage à faire parce que c’est une ressource qui est stratégique. Elle doit être gérée de manière durable, elle doit être gérée de manière respectueuse de l’environnement et surtout elle doit être gérée en fonction des intérêts du Québec d’abord et avant tout. »

« La forêt, aujourd’hui honnêtement, c’est un secteur qui est laissé à lui-même, a renchéri Dominique Anglade. Travaux sylvicoles qui ne se font pas, on ne développe pas, on ne prend pas soin de notre forêt comme on devrait le faire et ça, c’est un enjeu important parce que c’est partout, dans toutes nos régions du Québec et ç’a un impact considérable sur les changements climatiques.

« Premièrement, il y a toute la question des travaux sylvicoles. On devrait investir de manière importante pour entretenir nos forêts, ce qu’on ne fait pas aujourd’hui, ce qu’on ne fait pas suffisamment », a ajouté la cheffe libérale.

Confronter les barons du bois

Manon Massé a pour sa part affirmé que « le Québec est frileux à mettre des normes, mettre des cibles. Il abandonne nos forêts et laisse beaucoup trop de pouvoir aux forestières elles-mêmes ».

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Tout en reconnaissant que « certaines forestières agissent, bien sûr, de façon responsable », elle a fait valoir à l’instar de son vis-à-vis péquiste que « quand on sait que nos normes de construction ne permettent pas de construire des édifices commerciaux en bois alors qu’on exporte les deux par quatre et les poutres pour que les Européens, eux, construisent des ponts, des édifices commerciaux avec notre bois, c’est nous qui avons un problème ».

Selon Mme Massé, « il y a des cibles à se fixer, il y a des règles à se donner, il y a des cadres législatifs à changer et ça peut se faire assez aisément. Ça prend une volonté politique de confronter les barons du bois et actuellement ce n’est pas le ministre [des Fôrets, Pierre] Dufour qui joue ce rôle-là. »

Paul St-Pierre Plamondon a souligné que sa formation a demandé au gouvernement Legault de protéger une partie de la production pour le Québec, afin d’éviter les problèmes économiques actuels dans le secteur du bois de construction.

« On nous a répondu que les règles internationales ne le permettent pas. Or, les règles du GATT, l’OMC, permettent en cas de pénurie de protéger une certaine partie de notre production et nous on estime qu’on doit penser économiquement en fonction de nos intérêts nationaux et en fonction de l’environnement. Il y a définitivement un ménage à faire dans le domaine forestier », a-t-il conclu.