(Québec) « Il n’y a pas de nouvelles contraintes » pour les particuliers dans le plan vert du gouvernement Legault qui sera déposé à l’automne. Le ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Benoit Charette, mise plutôt sur des mesures incitatives pour amener les Québécois à changer leurs habitudes en vue de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES).

« On ne mobilise pas les gens à travers des tapes sur les doigts, lance-t-il en entrevue. Alors ce n’est pas un plan qui va miser sur la contrainte », que ce soit par l’entremise de taxes, de tarifs ou autre.

Tout comme son collègue des Transports, François Bonnardel, il s’oppose à l’idée d’imposer une taxe à l’immatriculation de 50 $ par véhicule dans les villes de banlieue de Montréal afin de financer les transports collectifs, idée avancée par l’Autorité régionale de transport métropolitain et la Communauté métropolitaine de Montréal. Cette taxe existe depuis plusieurs années pour les automobilistes montréalais.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, ARCHIVES LA PRESSE

Benoit Charette, ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques

Le « Plan pour une économie verte » a été « bonifié » depuis que son contenu a été révélé par La Presse le printemps dernier, soutient Benoit Charette. Il explique en substance que si les orientations restent les mêmes, des mesures concrètes pour les cinq prochaines années seront dévoilées au même moment, à l’intérieur d’une politique de mise en œuvre échelonnée sur cinq ans.

« Toujours des insatisfaits »

Le Plan pour une économie verte représente la stratégie du gouvernement pour atteindre sa cible de réduction des GES, une baisse 37,5 % d’ici 2030 par rapport au niveau de 1990. On mise en particulier sur l’électrification des transports et la conversion des systèmes de chauffage à énergie fossile, comme le mazout.

Or, un expert consulté par La Presse, Pierre-Olivier Pineau, professeur à HEC Montréal et titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie, concluait que le plan en arrive à une réduction de 16,45 mégatonnes de GES, soit une baisse de 24 %, et non de 37,5 %.

Il avait raison quand il disait qu’on n’avait pas 100 % de l’effort qui était identifié, et ça, on l’assume, parce qu’on veut associer la démarche à des mesures précises et des budgets précis.

Benoit Charette, ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques

Le ministre assure que le plan et la politique de mise en œuvre permettront d’atteindre la cible. Il ajoute qu’une reddition de comptes annuelle permettra de mesurer si le gouvernement « va dans la bonne direction ».

Le ministre reconnaît « tout à fait » qu’il y a encore beaucoup de scepticisme quant au virage vert de la Coalition avenir Québec. « C’est un domaine où l’on ne peut jamais rallier tout le monde. Des gens, spécialement en environnement, ne veulent pas être convaincus. Donc, peu importe ce qui sera fait, il y aura toujours des insatisfaits », affirme-t-il.

Le Plan pour une économie verte sera doté d’une enveloppe d’un peu plus de 6 milliards de dollars en cinq ans, comme l’indiquait le budget Girard. Cette somme est garantie, assure le ministre, même si les finances publiques ont depuis plongé dans le rouge en raison de la pandémie de COVID-19.

Automne bien rempli

L’automne sera bien rempli pour Benoit Charette. Il sort à peine d’un marathon à l’Assemblée nationale : après plus de 100 heures de débats, les députés viennent de terminer l’étude détaillée de son projet de loi 44, qui réforme le Fonds vert. Le ministre aura le plein contrôle sur la cagnotte, et deux organismes, le Conseil de gestion du Fonds vert et Transition énergétique Québec, sont abolis. Le projet de loi « confère beaucoup de pouvoir » au ministre, mais il existe des « garde-fous », souligne-t-il. Un comité scientifique, dont tous les avis seront rendus publics, et le commissaire au développement durable veilleront au grain.

800 millions

Somme rapportée chaque année par le marché du carbone, système de plafonnement et d’échange de droits d’émission de GES entre les entreprises. Celui-ci finance en bonne partie le Fonds vert.

Après une mise aux enchères « dramatique » le printemps dernier, en pleine pandémie, « on n’est pas inquiets », maintenant, pour l’entrée de revenus, affirme le ministre.

Il souligne que ce marché constitue en soi « une contrainte qui existe déjà » pour les entreprises, tandis que les citoyens paient la note à la pompe à essence. Il n’est pas nécessaire d’ajouter des mesures plus coercitives, selon lui.

Après l’adoption du projet de loi 44, Benoit Charette passera aux consultations sur un autre texte législatif, concernant les aires protégées, celui-là (le projet de loi 46). Le Québec accuse un retard dans la création de tels territoires.

Le ministre déposera également un projet de loi pour instaurer une consigne de 25 cents sur les bouteilles de vin et de spiritueux et de 10 cents sur tous les contenants de boisson prête à boire de 100 ml à 2 L — comme les bouteilles d’eau et de jus en plastique ainsi que les cartons de lait. La mesure entrera en vigueur progressivement à compter de l’automne 2022, après les élections générales.