Une entreprise en démarrage montréalaise prévoit dévoiler cet automne, dans le cadre d’une conférence climatique des Nations unies, une carte détaillée des émissions de carbone à la surface de la planète.

« GHGSat opère ses propres satellites pour mesurer les émissions de méthane et de dioxyde de carbone provenant de sites industriels à travers le monde et ça fait quelques années […] que nos clients et nos utilisateurs potentiels veulent avoir un accès plus global et public à nos données », a expliqué en entrevue le président et fondateur de la compagnie, Stéphane Germain.

La nouvelle carte, qui aura une résolution de deux kilomètres sur deux kilomètres, devrait être prête à temps pour la conférence COP26, en novembre, au Royaume-Uni.

Les cartes actuellement disponibles n’ont une résolution que de dix kilomètres sur dix kilomètres, ou au mieux de cinq kilomètres par cinq kilomètres, et les données qu’elles présentent peuvent être vieilles de plusieurs mois, voire d’un an ou deux, a ajouté M. Germain.

« Nous, ce qu’on propose, c’est une résolution beaucoup plus pointue […] qui va être disponible au minimum un mois après que les données soient collectées et on espère pouvoir le faire en quelques semaines après que les données soient collectées, a-t-il dit. On veut s’assurer que les plus récentes et les meilleures données possible sont disponibles aux gens qui vont participer au COP26. »

La nouvelle carte sera disponible gratuitement sur le site internet de GHGSat. Aux données de GHGSat s’ajoutent celles de partenaires comme l’Agence spatiale européenne ou la NASA.

« N’importe qui pourra venir visiter et consulter la carte, faire un zoom par région, par province, par État, pour voir ce qui se passe chez eux, que ce soient des industriels ou des personnes intéressées », a précisé M. Germain.

Ceux qui y détecteront des choses intrigantes et qui voudront en savoir plus pourront se procurer, contre rémunération, les autres cartes produites par GHGSat, et dont la résolution peut atteindre 25 mètres par 25 mètres.

Le méthane et le dioxyde de carbone comptent parmi les pires gaz à effet de serre responsables du réchauffement de la planète.

Compter les vaches

La quarantaine d’employés de GHGSat logent sur le boulevard Saint-Laurent, à Montréal, à quelques pas à peine du légendaire restaurant Schwartz’s.

Ses cinq principaux marchés sont celui des hydrocarbures, les centrales thermiques et hydroélectriques, les sites d’enfouissement, les mines de charbon — et les troupeaux de bétail.

« Quand on met 10 000 vaches dans un enclos d’un kilomètre par un kilomètre, ça génère beaucoup de méthane et on peut le voir de l’espace, a dit M. Germain. La technologie est rendue au point qu’on peut même compter les vaches de l’espace et on peut voir les émissions de méthane de l’ensemble des vaches. »

PHOTO CHIP RIEGEL, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

GHGSat fait partie « d’une nouvelle génération de technologies » qui est en mesure de faire des choses « très intéressantes avec des capteurs très avancés, mais sur une plateforme beaucoup plus petite », a-t-il indiqué.

Les satellites qu’elle utilise n’ont que la taille d’un four à micro-ondes. Elle espère en lancer deux autres cette année, et dix d’ici 2023.

« Si on regarde des données qui datent d’il y a un an ou deux, souvent les circonstances ont changé […], a dit M. Germain. Alors d’avoir des informations plus récentes avec une résolution plus précise, ça permet d’avoir de meilleures décisions […] pour aider ensuite à localiser la source des émissions et de mieux comprendre la nature de ces sources-là. »

La nouvelle carte devrait contribuer à une plus grande transparence des pays, quand viendra le temps de mesurer leurs progrès face aux engagements qu’ils ont pris dans la lutte aux changements climatiques.

« On veut s’assurer que les meilleures données soient disponibles pour la première évaluation des promesses de chaque pays dans leur contribution (à la lutte) aux changements climatiques », a précisé M. Germain.

Les industriels aussi y trouvent leur compte, ajoute-t-il, puisque les données leur permettent de « mieux comprendre, contrôler et résoudre leurs émissions ».