(Toronto) Une communauté autochtone a rejeté par une écrasante majorité l’entreposage souterrain de déchets nucléaires près du lac Huron, signant vraisemblablement du même coup la mort de ce projet de plusieurs milliards de dollars politiquement controversé.

Après un an de consultations et plusieurs jours de vote, la nation Saugeen Ojibway, qui compte 4500 membres, a annoncé vendredi soir que 85 % des inscrits avaient refusé d’accepter un dépôt géologique en profondeur à la centrale nucléaire de Bruce, près de Kincardine, en Ontario. Seulement 170 des votants ont approuvé le projet contre 1058 opposants.

« Nous n’avons pas été consultés lors de l’implantation de l’industrie nucléaire sur notre territoire, ont mentionné les autorités locales. Au cours des 40 dernières années, la production d’énergie nucléaire à Anishnaabekiing a eu de nombreux impacts sur notre communauté, nos terres et nos eaux. »

Le géant des services publics de la province, Ontario Power Generation, voulait construire cette installation à 680 mètres sous terre à environ 1,2 kilomètre du lac Huron pour l’entreposage permanent des déchets radioactifs de faible et moyenne activité. Le projet avait été provisoirement approuvé en mai 2015.

Si Kincardine était un « hôte volontaire », la proximité relative du bunker avec le lac Huron a déclenché un contrecoup ailleurs au Canada et aux États-Unis. Les politiciens, les écologistes et des dizaines de collectivités ont exprimé leur opposition.

Les gouvernements fédéraux successifs ont refusé de donner une approbation définitive. En août 2017, la ministre de l’Environnement, Catherine McKenna, a suspendu le processus — le dernier d’une série de retards pour le projet — pour garantir l’adhésion des nations autochtones de la région.

Le promoteur qui a toujours maintenu que le substrat rocheux stable pouvait contenir en toute sécurité les déchets nucléaires, a dit qu’il respectait la décision de la communauté autochtone.

« Ontario Power Generation explorera d’autres options et collaborera avec les principales parties prenantes pour développer un autre processus de sélection d’un emplacement, a dit son président et chef de la direction, Ken Hartwick, par voie de communiqué de presse. Tout nouveau processus comprendra un engagement envers les peuples autochtones et les municipalités intéressées. »

Selon l’un des chefs de la nation Saugeen Ojibway, Lester Anoquot, ce vote représente un « jalon historique et [une] victoire capitale » pour sa communauté.

« Nous avons travaillé pendant de nombreuses années pour que notre droit à exercer notre juridiction sur notre territoire et le consentement libre, préalable et éclairé de notre peuple soient reconnus, a déclaré M. Anoquot. Nous n’avons pas demandé que ces déchets soient créés et entreposés sur notre territoire. »

M. Anoquot a ajouté que le vote a aussi montré la nécessité d’une nouvelle solution pour les déchets dangereux, un processus qui, selon lui, pourrait prendre de nombreuses années.