(Québec) Le metteur en scène Dominic Champagne a secoué les députés, mercredi, alors qu’il réclamait en commission une action plus musclée en environnement.

Survolté, gesticulant abondamment, l’instigateur du Pacte pour la transition les a accusés d’être « embourbés » dans la bureaucratie et la politicaillerie au moment où il y a « urgence d’agir » pour éviter « la fin de la civilisation humaine ».

Il a sermonné le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, l’enjoignant d’assumer pleinement son leadership dans la lutte aux changements climatiques. Par exemple, il pourrait créer un Hydro-Québec des changements climatiques, a-t-il dit.

Il « l’implore » d’adopter des cibles plus ambitieuses de réduction de gaz à effet de serre (une baisse de 50 % par rapport à 1990 dès 2030) et surtout, de les inscrire clairement dans la loi québécoise.

« Soyez à la hauteur, s’est-il exclamé. La différence entre deux degrés et quatre degrés de réchauffement, savez-vous c’est quoi, et ce n’est pas une joke, c’est la fin de la civilisation humaine. […] Ne finassons pas, ne politicaillons pas. »

M. Champagne témoignait, mercredi, dans le cadre des consultations publiques sur la réforme du Fonds vert. Le projet de loi 44 abolirait le conseil de gestion et Transition énergétique Québec (TEQ) et donnerait tous les pouvoirs au ministre.

Il a comparé le défi des changements climatiques à la Seconde Guerre mondiale, en soulignant que les parlementaires de l’époque ne s’étaient pas perdus dans des débats stériles avant de décider d’attaquer le Troisième Reich.

« Churchill n’a pas laissé gommer la capacité industrielle alliée dans des consultations à n’en plus finir alors que les V2 bombardaient Londres », a-t-il déclaré, avant d’accuser le ministre de ne pas écouter ce qu’il disait.

Selon lui, les politiciens sont « embourbés » dans « l’appareil de l’État ». « C’est à désespérer, je me dis : “Qu’est-ce qu’ils ne comprennent pas dans la gravité de la situation ? » Combien de feux en Australie ça va prendre ? Va-t-il falloir que ce feu-là pogne ici ou qu’on ait des inondations cataclysmiques pour se dire : « Ah oui, mon Dieu” ? »

La députée de Mercier, Ruba Ghazal, de Québec solidaire, a remercié M. Champagne d’avoir tenu un « discours qui nous fouette ». Le ministre Charette s’est pour sa part défendu en disant être « réaliste ». D’après lui, les cibles que fixera son gouvernement (une réduction de 37,5 % par rapport à 1990 dès 2030) sont déjà « excessivement ambitieuses ».

Au final, le président de la commission, le libéral Saul Polo, a dû couper le micro du passionné metteur en scène qui n’a pas cessé de parler alors que son temps était écoulé.

Surtout ne pas culpabiliser le citoyen

Entre deux envolées verbales, M. Champagne a également abordé la question des comportements individuels, à la lumière du récent rapport sur l’état de l’énergie produit par HEC Montréal.

Ce rapport démontre que les tendances de consommation au Québec sont contraires aux objectifs énergétiques et de réduction de gaz à effet de serre : les Québécois consomment toujours plus de produits pétroliers et achètent de plus en plus de camions légers.

« C’est extrêmement important de ne pas culpabiliser ou pointer les individus comme étant les responsables de la crise », a soutenu M. Champagne, en disant croire que les citoyens étaient responsables de seulement 20 % du problème.

Plutôt, ce serait aux gouvernements d’en faire plus, selon lui, en envoyant des signaux clairs et en légiférant des balises qui découragent les comportements énergivores.

Dominic Champagne a aidé à organiser une manifestation monstre pour l’environnement à Montréal en septembre dernier. Il a indiqué, mercredi, qu’il s’exprimait au nom des 285 000 signataires du Pacte de la transition.

Les consultations publiques sur le projet de loi 44 se poursuivront jeudi avec entre autres les témoignages de la Fondation David Suzuki, du Conseil du patronat et du professeur Pierre-Olivier Pineau, de HEC Montréal.