Une entreprise de Montréal ambitionne de révolutionner le recyclage des batteries lithium-ion, utilisées notamment dans les véhicules électriques.

Recyclage Lithion démarrera en janvier une usine pilote dans le secteur industriel d’Anjou, dans le nord-est de la métropole.

L’entreprise a annoncé mardi avoir reçu une subvention de 4,8 millions de dollars du gouvernement québécois pour ce projet évalué à 12 millions de dollars.

À l’heure actuelle, les principales technologies de recyclage de ce type de batteries ont recourt à la pyrométallurgie.

«On les brûle», résume Benoit Couture, président de Recyclage Lithion, précisant que «50% des constituants de la batterie» sont perdus dans l’opération.

Or, la technologie développée par son entreprise avec la firme de génie-conseil Seneca, qui est en instance de brevet, permet d’extraire 95% des composantes d’une batterie.

Celles-ci pourront être utilisées pour fabriquer de nouvelles batteries, qui auront «exactement les mêmes performances que si elles étaient faites avec des matériaux vierges», assure M. Couture.

Essentiellement, le procédé de Recyclage Lithion est une méthode automatisée qui démantèle les batteries et extrait leurs métaux avec des solvants; ceux-ci sont d’ailleurs réutilisés, ce qui amène le président de l’entreprise à parler de «procédé vert qui émet très peu de gaz à effet de serre».

Projet «novateur»

Le procédé de Recyclage Lithion constitue «une évolution très, très marquée par rapport à la concurrence», a souligné le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles Jonatan Julien, vantant un projet «novateur».

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Le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Jonatan Julien, et Benoit Couture, président de Recyclage Lithion.

Alors que les ventes de véhicules électriques sont en forte croissance, «une quantité significative de batteries arriveront à la fin de leur durée de vie d’ici 10 ans», affirme le ministre.

«On est vraiment dans la course pour être prêts quand le volume va être là», s’enthousiasme le président de Recyclage Lithion.

L’usine pilote, qui aura la capacité de traiter 200 tonnes de batteries annuellement, devrait commencer à fonctionner au «premier trimestre de 2020» et sa phase de démarrage durera «six mois à un an», a expliqué Benoit Couture.

Sa raison d’être est d’abord de «terminer le développement et d’optimiser le procédé», en plus de servir de vitrine pour «accueillir des visiteurs de partout dans le monde».

Recyclage Lithion prévoit ouvrir une usine commerciale d’une capacité de 2000 tonnes par année vers 2023 ou 2024, possiblement dans l’Est de Montréal également, affirme son président.

Son entreprise devra toutefois faire face au défi de l’approvisionnement, reconnaît-il, disant vouloir s’assurer que les batteries en fin de vie utile ne soient pas expédiées à l’étranger.

«Un pas dans la bonne direction»

L’annonce est accueillie positivement par la Coalition pour que le Québec ait meilleure mine, qui parle d’«un pas dans la bonne direction».

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Benoit Couture pose devant une batterie provenant d'une voiture Kia Soul.

«C’est positif, il faut dire bravo au fait de réfléchir dès maintenant à une filière de recyclage des minéraux stratégiques», a déclaré à La Presse le porte-parole de l’organisation, Ugo Lapointe.

«Ça va être un enjeu majeur au cours des prochaines années», ajoute-t-il.

Mais développer une technologie n’est qu’une partie du défi à relever, prévient-il.

Les États doivent «mettre en place un cadre législatif et fiscal pour prioriser la récupération et le recyclage» des batteries, estime-t-il, soulignant qu’en produire à partir d’extraction minière est moins coûteux qu’à partir de matières recyclées.

«Si on veut prétendre faire du transport plus propre, il faut penser à l’ensemble de la chaîne.»

Le recyclage des batteries faisait partie des cinq conditions réclamées le mois dernier par une coalition d’experts, d’organismes environnementaux, d’élus et de citoyens «pour que l’électrification des transports ait meilleure mine».

Il faut «prioriser les investissements dans le recyclage et l’économie circulaire», écrivait alors la coalition dans un communiqué.