Waste Management (WM) poursuit la Ville de Drummondville afin d’obtenir le changement de zonage requis pour lui permettre de poursuivre à long terme l’exploitation d’un important site d’enfouissement de la région.

Dans une requête déposée en Cour supérieure le 7 octobre, la multinationale relève que la municipalité « s’arroge un pouvoir que la loi ne lui confère pas » en refusant de procéder au changement en question et risque, du même coup, de bloquer indûment ses projets d’agrandissement.

Le ministère de l’Environnement avait permis en 2013 à WM d’accroître la superficie utilisée pour l’enfouissement de déchets dans le secteur de Saint-Nicéphore.

L’autorisation, valable pour une période de sept ans, ne couvrait cependant qu’une partie de l’agrandissement souhaité par la firme, qui revient aujourd’hui à la charge à ce sujet.

La poursuite souligne que la municipalité régionale de comté de Drummond avait modifié « sans équivoque » en 2012 le plan de gestion des matières résiduelles de manière à permettre la réalisation de l’ensemble du projet d’agrandissement et que ces dispositions n’ont pas été modifiées dans la mouture révisée du plan en 2015.

La Ville de Drummondville, selon la multinationale, n’avait d’autre choix que de « prendre acte » du changement décidé au niveau régional et d’ajuster son règlement de zonage pour que l’ensemble du terrain ciblé puisse potentiellement servir à des fins d’enfouissement.

Un délai de 60 jours

Une mise en demeure adressée à la Ville en août est restée sans suite, déplore WM, qui a entamé cet hiver des démarches pour obtenir l’aval du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques à la nouvelle phase d’agrandissement projetée.

Me Christine Duchaine, qui représente WM, note que le Ministère a le pouvoir d’émettre un décret autorisant la demande s’il la juge appropriée et conforme aux dispositions du plan de gestion des matières résiduelles en vigueur.

L’entreprise, dit-elle, ne pourra cependant pas aller de l’avant avec l’aménagement et l’exploitation du terrain ciblé tant que Drummondville refuse de revoir le zonage.

WM souhaite donc que le tribunal ordonne à la Ville de procéder à l’intérieur d’une période de 60 jours.

Le maire de Drummondville, Alexandre Cusson, qui est préfet de la MRC de Drummond, a déjà indiqué qu’il s’opposait à tout nouvel agrandissement du site d’enfouissement.

En entrevue, l’élu a promis vendredi de contester énergiquement la poursuite. Une firme d’avocats a été embauchée à cet effet.

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Alexandre Cusson, maire de Drummondville et préfet de la MRC de Drummond

« On va défendre nos citoyens et le fait qu’on peut, comme ville, faire nos choix en matière de zonage », indique M. Cusson, qui entend rencontrer le ministère de l’Environnement pour faire valoir sa position dans le dossier.

« Le gouvernement doit reconnaître que les gens de Drummondville ont fait leur choix et ne veulent pas d’agrandissement du site d’enfouissement », dit-il.

« Ils veulent diriger la ville »

Le Groupe des opposants au dépotoir de Drummondville (GODD) accuse la multinationale de vouloir bafouer l’autorité des élus locaux.

« Ils en font un peu trop. On dirait qu’ils veulent diriger la Ville à la place du conseil municipal », dit le porte-parole de l’organisation, Jean-Guy Forcier.

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Jean-Guy Forcier, porte-parole du Groupe des opposants au dépotoir de Drummondville

« C’est de compétence des municipalités de décider de l’utilisation de leur sol », ajoute-t-il.

En plus de poursuivre la Ville, WM cherche à faire invalider en Cour d’appel une clause du décret de fusion de 2004 ayant mené au regroupement de Drummondville et Saint-Nicéphore qui prévoit une consultation référendaire sur tout projet d’agrandissement du site d’enfouissement.

Cette consultation, selon le GODD, visait à conférer aux citoyens « un droit de veto », que WM souhaite faire disparaître.

Le porte-parole de la multinationale, Martin Dussault, ne craint pas que la multiplication des processus judiciaires envenime les relations avec la Ville et la population.

Il souligne que WM a tenté en vain, par de nombreuses démarches, de convaincre Drummondville de procéder au changement de zonage souhaité avant de se résigner à faire appel aux tribunaux.

« On ne peut pas nous reprocher de faire valoir nos droits », souligne M. Dussault.