(Ottawa) Les mesures mises en place par le gouvernement fédéral pour protéger les baleines noires de l’Atlantique Nord des navires et des filets de pêche pourraient ne pas suffire pour empêcher d’autres mammifères marins d’être blessés ou tués dans l’est du Canada, selon les données contenues dans une nouvelle étude.

Selon l’étude fédérale, les limitations de vitesse et la fermeture de zones de pêche dans le golfe du Saint-Laurent ont réduit les risques de nuire aux baleines en voie de disparition, mais des dangers subsistent, en particulier dans les eaux situées en dehors des zones protégées.

L’étude a été effectuée à la fin de l’année dernière par des scientifiques qui travaillent dans des universités et des ministères fédéraux partout au Canada.

Ils ont examiné les données compilées par des experts des mammifères marins au cours des trois dernières années. Ils voulaient avoir une meilleure idée du nombre de baleines qui se rassemblent dans les eaux canadiennes de l’Atlantique et comprendre pourquoi elles s’établissent là. Ils ont également tenté de déterminer les risques que courent les baleines noires dans le golfe du Saint-Laurent, l’étendue d’eau semi-fermée qui se trouve entre les quatre provinces de l’Atlantique et la côte est du Québec.

Six baleines noires de l’Atlantique Nord sont mortes dans l’est du Canada depuis le début du mois de juin cette année, et la semaine dernière, une autre a été aperçue vivante, mais emmêlée dans un filet de pêche.

Chaque mort est un revers majeur pour ces espèces en voie de disparition. Il ne resterait que 400 baleines sur la planète et aucune d’entre elles n’aurait eu de bébés l’année dernière.

L’étude fédérale a confirmé une présence accrue de baleines noires dans le golfe du Saint-Laurent depuis 2015, les concentrations les plus élevées ayant été enregistrées durant les mois les plus chauds. Elles viennent chercher de la nourriture et leur repas préféré — un petit crustacé en particulier — est devenu abondant dans le golfe depuis 2010.

Selon des relevés aériens, il y avait eu au moins 190 baleines noires dans le golfe l’année dernière, soit la moitié de la population totale du monde entier.

Dangers à l’extérieur des zones

Les scientifiques ont déterminé que les restrictions de vitesse obligatoires mises en place en 2017 avaient effectivement réduit les risques de collisions mortelles de 56 %.

Toutefois, à l’extérieur de ces zones, le danger devient de plus en plus grand.

Cela est dû en partie à l’augmentation du trafic maritime. Mais les scientifiques soulèvent aussi la possibilité que les bateaux accélèrent juste avant qu’ils n’atteignent les zones de restrictions « probablement en vue de réduire leur vitesse dans cette zone ».

Dans ces cas, si une collision survient, le risque de mortalité est de près de 100 %, indique le rapport.

Les scientifiques ont également exprimé leur inquiétude quant à la diminution, en 2018, de la zone de ralentissement dans un secteur situé au nord de l’île d’Anticosti, qui est particulièrement exposé aux risques de collision avec des navires.

En ce qui concerne les risques liés aux filets de pêche, les scientifiques ont noté que la baleine noire avait été très présente dans les zones de pêche animées du golfe du Saint-Laurent au cours des trois dernières années. Les restrictions de pêche imposées dans certaines des zones où les baleines ont été les plus nombreuses ont aidé, mais elles continuent de s’enchevêtrer dans les filets, principalement dans les engins pour pêcher le crabe des neiges.

Il y a eu au moins deux enchevêtrements en 2016, sept en 2017 et au moins trois en 2018.

Plus de surveillance nécessaire

Dans l’ensemble, les scientifiques ont signalé qu’il était difficile de prédire ce qui arrivera à l’avenir, puisque la présence des baleines noires dans le golfe du Saint-Laurent est relativement nouvelle.

Les efforts de surveillance et de détection ont augmenté depuis 2017, notamment en écoutant les appels de baleines, en consultant les relevés aériens et observant visuellement depuis les bateaux. Mais toutes ces méthodes ont des failles quant à la précision, en raison des conditions météorologiques difficiles et du bruit ambiant.

Une surveillance plus approfondie est nécessaire pour fournir des avis scientifiques solides et ainsi élaborer des politiques qui pourront régler le problème, soulignent les scientifiques.