Les gestes verts sont perçus comme étant plus efficaces lorsqu’ils sont accomplis dans un but égoïste plutôt que pour sauver la planète, révèle une nouvelle étude réalisée par des chercheurs de Zurich.

Contre-intuitif

Adopter un comportement bon pour l’environnement, comme se déplacer à vélo ou ne pas manger de viande, est mieux perçu lorsque celui qui l’accomplit agit dans un but égoïste plutôt que pour des raisons environnementales. « Cela peut sembler surprenant et contre-intuitif, mais c’est ce que nous avons observé », explique en entrevue Gea Hoogendoorn, doctorante en décisions environnementales à l’École polytechnique fédérale de Zurich. Elle en a fait la démonstration en coécrivant l’article « When Good Intentions Go Bad : The Biased Perception of the Environmental Impact of a Behavior Due to Reliance on an Actor’s Behavioral Intention », publié dans le Journal of Environmental Psychology.

Égoïsme contre moralité

Pour arriver à cette conclusion, les chercheurs ont demandé à des centaines de participants de lire des énoncés sur le comportement de diverses personnes fictives. Les participants devaient ensuite donner leur avis sur différents aspects du comportement décrit, dont ses répercussions sur l’environnement. Résultat : les comportements motivés par l’égoïsme (par exemple : « Robert s’est acheté une voiture qui consomme peu d’essence parce qu’il veut réduire ses frais de transport ») étaient jugés comme ayant une incidence plus positive sur l’environnement que les mêmes comportements présentés sous l’angle de l’environnement (« Robert s’est acheté une voiture qui consomme peu d’essence parce qu’il veut réduire son impact environnemental »).

Sentiment d’être jugé

Comment expliquer ce décalage ? C’est que la motivation morale de certains en faveur de l’environnement peut donner aux observateurs le sentiment d’être inférieurs. « Adopter un comportement écoresponsable afin d’aider l’environnement peut donner aux autres l’impression d’être jugés parce qu’eux-mêmes n’adoptent pas ce comportement, dit Mme Hoogendoorn. Personne n’aime se sentir jugé. Donc, communiquer un comportement d’une façon qui ne cause pas ce sentiment d’être jugé pourrait avoir une plus grande influence et donner aux autres l’envie de l’adopter eux aussi. » Selon cette logique, relever par exemple que les déplacements à vélo sont rapides, économiques et bons pour la santé pourrait être plus productif que d’insister sur le fait qu’ils sont plus écologiques que les déplacements en voiture.

Chocolat contre salade

Les chercheurs ont réalisé que le seul fait d’être exposé à une personne qui fait un geste motivé par la moralité peut donner aux observateurs le sentiment d’être moralement inférieurs à cette personne. Les gens ont tendance à y faire face en s’éloignant d’elle ou en la discréditant. « Par exemple, manger une barre de chocolat à côté d’une personne qui mange une salade vous procurera un sentiment différent que si vous la mangez à côté d’une personne qui mange un morceau de gâteau. Le sentiment d’être jugé par les personnes plus morales peut être contre-productif. Les gens évaluent le contexte lorsqu’ils jugent un comportement. Quand le contexte change, l’évaluation change. »