La Cour d’appel du Québec a refusé ce matin de se prononcer dans la cause opposant la minière Canada Carbon à Grenville-sur-la-Rouge.

La petite municipalité des Laurentides tente de faire invalider la poursuite en dommages-intérêts de 96 millions de dollars intentée par l’entreprise de Vancouver.

Elle a porté en appel la décision de la Cour supérieure du Québec, qui avait estimé en novembre qu’il était prématuré de qualifier le recours de « poursuite-bâillon ».

La Cour d’appel, qui entendait cette requête ce matin à Montréal, se questionne toutefois sur sa compétence à se prononcer sur la décision d’un tribunal inférieur portant sur une « requête en rejet ».

Elle a donc invité les parties à soumettre leur argumentaire sur la question d’ici deux semaines.

« Ce n’est pas une décision sur le fond, on parle d’une demande de permission d’appeler et il faut faire le débat », a expliqué à La Presse Me Marc-André LeChasseur, avocat de la municipalité.

Si la Cour d’appel ne parvient pas à déterminer si elle a compétence pour trancher la question, les parties en débattront lors d’une audience en août, si bien que l’appel sur le fond ne pourrait être entendu qu’à l’automne.

Poursuite-bâillon ?

L’étirement des procédures « démontre qu’il y a un problème dans les lois actuelles, qui ne sont pas assez claires, pas assez fortes, pour protéger les municipalités dans des situations semblables », a déclaré à La Presse Ugo Lapointe, coordonnateur de Mining Watch Canada et membre de la coalition Pour que le Québec ait meilleure mine.

Grenville-sur-la-Rouge « doit se défendre depuis près d’un an et elle en a encore facilement pour une autre année, sinon deux », dit-il.

Si les grandes municipalités ont les ressources humaines et financières pour faire face à de telles procédures, c’est « extrêmement difficile » pour les plus petites qui n’ont pas les mêmes moyens, souligne M. Lapointe, qui rappelle que Grenville-sur-la-Rouge vient de traverser des inondations.

« Ils ont d’autres chats à fouetter ! », s’exclame-t-il.

Canada Carbon reproche à Grenville-sur-la-Rouge de lui faire perdre des revenus potentiels en bloquant son projet de carrière de marbre et de mine de graphite à ciel ouvert.

Le montant de sa poursuite, 96 millions de dollars, équivaut à 16 fois le budget annuel de la municipalité de près de 2 800 habitants.

Grenville-sur-la-Rouge estime qu’il s’agit d’une poursuite abusive et souhaite la faire rejeter par les tribunaux.