Le gouvernement Couillard a reporté hier de trois ans l'adoption de mesures permanentes pour protéger les milieux humides. Le ministre de l'Environnement, David Heurtel, a également lancé une vaste refonte d'un régime d'évaluation environnementale qu'il juge trop lourd.

En 2012, la Cour supérieure a invalidé les directives édictées par Québec pour protéger les marais, marécages et tourbières. Le gouvernement Charest a alors adopté à toute vapeur le projet de loi 71, qui prévoit que Québec peut exiger d'être compensé pour le remblayage de milieux humides.

Cette loi devait venir à échéance en avril 2015, le temps que des mesures permanentes soient adoptées. Or, a affirmé hier le ministre Heurtel, Québec a besoin de plus de temps. Il a lancé la pierre au gouvernement péquiste de Pauline Marois, qu'il a accusé d'avoir laissé traîner le dossier.

«Entre 2012 et maintenant, il y a eu une élection et il y a eu un gouvernement qui n'a pas fait grand-chose en matière d'élaboration d'un projet de loi prêt à partir sur la question des milieux humides, a-t-il dit. Alors nous, lorsqu'on est arrivés aux affaires il y a 10 mois, on devait presque repartir de zéro.»

L'annonce a été décriée par les écologistes, qui soutiennent au contraire que Québec a tout en main pour légiférer. Christian Simard, du groupe Nature Québec, affirme que Québec a maintes fois consulté les parties prenantes sur des mesures de protection des milieux humides et qu'un projet de loi était prêt à déposer encore tout récemment.

«Il y a eu une série de recommandations et de consultations avec les fonctionnaires qui testaient les orientations de la future loi devant nous, expose M. Simard. Ça fait deux ans que ça dure, des rencontres régulières. La loi est prête, c'est simplement qu'on a décidé de la botter de côté pendant trois ans.»

Mais l'élaboration de mesures pour protéger des milieux humides est particulièrement complexe, explique M. Heurtel, car elles touchent des lois qui régissent la forêt, l'agriculture et les municipalités.

«Ça a des ramifications sur d'autres milieux, explique-t-il. On ne peut pas travailler en vase clos.»

Le ministre a annoncé un vaste examen du régime d'autorisation environnementale. Il tiendra bientôt une consultation visant à moderniser la Loi sur la qualité de l'environnement, qui est restée pratiquement inchangée depuis 1972. La démarche mènera au dépôt d'un projet de loi à l'automne.

M. Heurtel espère ainsi rendre plus efficace le processus d'approbation environnementale des projets.

«C'est vraiment la mécanique qu'on veut revoir, a-t-il résumé. Il y a des délais qui sont beaucoup trop longs, il y a des redondances, il y a un besoin de clarifier certains procédés, il y a un besoin d'être capable d'avoir plus de prévisibilité par rapport au régime.»

Au cours des dernières années à Ottawa, le gouvernement Harper a adopté une série de réformes de l'évaluation environnementale qui ont été vertement dénoncées par les écologistes. Le gouvernement conservateur a justifié ces réformes par la nécessité de rendre le processus plus efficace.

C'est pourquoi les écologistes ont accueilli avec une certaine méfiance l'initiative de Québec, bien qu'ils comptent participer aux consultations.

«On simplifie, estime Christian Simard, de Nature Québec. C'est comme si on perçoit la protection de l'environnement comme une contrainte économique, alors que ça doit être à la base de la nouvelle économie.»