À l'issue du vote de mardi dernier, Équiterre conclut que «la majorité des électeurs ont rejeté l'approche environnementale des conservateurs». Le Sierra Club estime pour sa part qu'«il est clair que les Canadiens ont voté pour l'environnement».

Hum...

Au lendemain d'élections qui ont vu leur bête noire prendre à nouveau les rênes du pays, les écologistes se consolent comme ils le peuvent. Mais la réalité est autrement plus brutale qu'ils ne (se) l'avouent.

 

Non seulement les Canadiens ont-ils réélu la formation qui a la plateforme environnementale la plus faible, mais ils ont également refusé d'ouvrir la porte du parlement au Parti vert pour la huitième fois d'affilée. Même sa chef s'en est vu refuser l'accès.

Et ce, lors des toutes premières élections canadiennes à avoir hissé l'environnement au palmarès des priorités électorales.

Dur...

Dans un tel contexte, les écologistes auraient intérêt à remettre en question la pertinence du parti qui porte leur cause plutôt que de se péter les bretelles. À une époque où l'environnement est récupéré par la plupart des formations politiques, le Parti vert a-t-il encore sa raison d'être?

L'environnement a quitté la colonne des causes marginales. Les communistes et les marxistes-léninistes ont peut-être besoin de leur propre parti, mais pas les verts, qui militent en faveur d'une cause à laquelle le grand public est désormais sensible. Pourquoi donc ne pas agir en conséquence et se rapprocher, justement, des partis grand public?

La question se pose avec encore plus d'acuité cette année, car jamais le Parti vert n'a été en aussi bonne posture pour remporter un siège. Côté leadership, le parti comptait sur l'écologiste la plus connue au Canada après David Suzuki. Côté visibilité, il a été représenté aux débats des chefs. Et côté contenu, il présentait une plateforme impressionnante, qui abordait un à un chacun des enjeux chers aux Canadiens.

Il y a peu de chances que les astres s'alignent avec plus de précision aux prochains scrutins. D'où l'importance d'une sérieuse remise en question.

Mme May répond que sa formation a joué un rôle important mardi dernier, qu'elle a permis d'éviter que les conservateurs ne deviennent majoritaires. Or, en éparpillant le vote de gauche, les verts n'ont-ils pas plutôt donné un coup de pouce à leurs adversaires les plus éloignés idéologiquement?

«Tout ce que fait le Parti vert, c'est diviser le vote et faciliter la vie à Stephen Harper, qu'il abhorre pourtant», note Nelson Wiseman, l'un des rares politologues canadiens à s'intéresser sérieusement à cette formation.

Cela dit, y a-t-il un risque que l'environnement quitte l'écran radar politique avec le sabordement du Parti vert? Pas du tout.

Certes, les libéraux, échaudés par l'accueil glacial qu'a obtenu leur projet de taxe sur le carbone, décideront probablement de mettre l'environnement en sourdine pour quelque temps. Les conservateurs, confortés dans leur impression que la gauche surestime l'importance de l'environnement, en feront autant.

Mais pas le NPD ni le Bloc, qui continueront à voir l'environnement comme un enjeu d'importance. Ce dossier fait partie de leurs priorités depuis suffisamment longtemps pour dissiper toute crainte en ce sens.

Imaginez si, en plus, les militants du Parti vert finissaient par grossir leurs rangs...