Produire du carburant pour les voitures avec du maïs coûte cher et comporte au mieux des avantages environnementaux marginaux, affirme l'OCDE, qui prône la levée des barrières tarifaires afin de faciliter les échanges d'éthanol à base de canne à sucre.

«Pour diminuer l'usage de carburants fossiles, il vaut mieux diminuer la consommation et laisser de côté les carburants alternatifs», affirme le rapport, rédigé par l'économiste Martin von Lampe. Ouvrir les marchés pour les biocarburants permettrait une production plus efficace à meilleur coût et en même temps pourrait améliorer les impacts environnementaux et réduire la dépendance aux carburants fossiles.» M. von Lampe a calculé qu'avec l'éthanol à base de maïs, chaque tonne de gaz à effet de serre évitée coûte entre 960$US à 1700$US, surtout en fonds publics. Un vrai gaspillage, étant donné qu'on peut réduire les émissions à 40$US la tonne actuellement, sur le marché européen.

Le rapport tombe quelques semaines après l'adoption au Parlement de la loi qui forcera l'inclusion d'un minimum de 5% d'éthanol dans l'essence à la pompe au Canada d'ici 2010. «Le rapport fait une bonne synthèse et martèle bien ce qu'on sait déjà, dit Bruno Larue, économiste agricole à l'Université Laval. Les politiques qui favorisent l'éthanol-maïs ne sont pas très efficaces pour réduire les gaz à effet de serre. Ce serait mieux de libéraliser les échanges avec les producteurs comme le Brésil.»

Le rapport de l'OCDE fait des projections basées sur les politiques en vigueur ou prévues pour les prochaines années. L'auteur fait clairement le rapport entre ces politiques et les prix des denrées alimentaires. «Continuer le développement et l'expansion des biocarburants va contribuer à la hausse des denrées alimentaires à moyen terme et à l'insécurité alimentaire pour les populations les plus vulnérables des pays en développement.»

Si on abandonnait tout appui public aux biocarburants, sous forme de subvention, tarifs douaniers et exigence de contenu, 770 000 hectares de terres arables seraient libérés pour d'autres cultures en Amérique du Nord, et plus de 6 millions d'hectares à l'échelle de la planète.

Pour ce qui est des gaz à effet de serre (GES), l'éthanol-maïs permet de diminuer les émissions de seulement 20% par rapport à l'essence, estime l'OCDE. Alors que l'éthanol-canne à sucre atteint en moyenne une réduction de 85%. Elle peut même dépasser les 100% - soit une réduction nette - si les résidus de canne à sucre sont utilisés pour produire de l'électricité.

Avec un bilan aussi sombre, les politiques en faveur de l'éthanol vont-elles changer? M. Larue ne le croit pas. «Je ne m'attends pas à ce qu'il y ait un gros impact, dit-il. Il y a une volonté politique d'aider les agriculteurs, tant aux États-Unis qu'en Europe ou au Canada. Avec tout ce qui a été investi dans les distilleries d'éthanol aux États-Unis, ça m'étonnerait qu'il y ait une volte-face.»

«La politique énergétique de bien des pays industrialisés est une politique agricole déguisée», affirme M. Larue.