Le candidat caquiste dans Saint-Jean, Stéphane Laroche, est propriétaire du pub O'Bock, établissement situé à Saint-Jean-sur-Richelieu reconnu pour avoir à maintes reprises accueilli des jeunes d'âge mineur, malgré de nombreux avertissements, et d'avoir offert un salaire inférieur aux femmes, en comparaison de celui versé à ses employés masculins, selon ce qu'a appris La Presse canadienne mardi.

Qualifié de «multirécidiviste», M. Laroche a eu ces dernières années plusieurs démêlés avec la Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ), qui a suspendu son permis d'alcool à trois reprises, et avec la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité au travail (CNESST), parce qu'il ne respectait pas la loi sur l'équité salariale.

Célébrer la «Nain-Jean-Baptiste»

Le bar sportif O'Bock accueille une clientèle jeune. On y pratique le «beer pong», un jeu de balle ayant pour effet d'encourager les clients à boire davantage, et on y organise divers événements tout au long de l'année, lors de la Saint-Valentin ou à l'occasion de la fête nationale des Québécois.

Ainsi, en 2015 et 2016, M. Laroche a choisi d'attirer la clientèle en misant sur le fait qu'il avait pensé confier l'animation de la fête nationale des Québécois à un nain. La traditionnelle «Saint-Jean-Baptiste» a donc été rebaptisée «Nain-Jean-Baptiste».

Mais «le nain a été bien traité et il a été payé», a commenté l'attaché de presse de la Coalition avenir Québec (CAQ), Mathieu St-Amand, lorsqu'il a été questionné sur l'à propos et la signification à donner à cette décision.

Le chef de la CAQ , François Legault, était au courant des démêlés de son candidat avec l'État, et juge que cela ne le disqualifie en rien pour être candidat du parti. «M. Laroche a toute notre confiance», a fait savoir M. St-Amand. M. Laroche a refusé quant à lui toute demande d'entrevue.

Le chef endosse totalement et sans réserve son candidat. Sur le site web du parti, M. Legault le présente comme un gestionnaire «altruiste et généreux», le candidat idéal «pour défendre les familles».

Un «multirécidiviste»

Le bar O'Bock a été fermé récemment et doit rouvrir sous une nouvelle administration, selon le compte Facebook de l'établissement.

M. Laroche s'est fait taper sur les doigts par la RACJ à trois reprises entre 2010 et 2018, pour avoir laissé entrer des jeunes d'âge mineur dans son bar et ne pas avoir respecté ses engagements de rehausser les mesures de sécurité à la porte d'entrée.

La dernière audience date de février 2018. Dans la décision de la régie, on peut lire les témoignages des policiers municipaux arrivés sur les lieux en avril 2015.

«Ils ont constaté qu'il y avait une centaine de clients, qu'il n'y avait pas de préposé à la sécurité posté à l'entrée de l'établissement, qu'il y avait deux employés sur place et que certains clients jouaient au »beer pong«».

La régie note que l'établissement démontre «de sérieuses lacunes à l'égard du contrôle des mineurs» à l'entrée, et que M. Laroche n'a pas respecté les engagements pris antérieurement pour embaucher des portiers et exiger de voir deux cartes d'identité.

La régie estime qu'il s'agit là d'un «facteur aggravant», le plus «troublant» dans cette histoire étant que le bar en question en est à sa quatrième convocation devant la Régie (la troisième pour M. Laroche) pour avoir accueilli des jeunes de moins de 18 ans. Elle juge que cela mérite une sanction «exemplaire» et double la durée de la suspension de permis précédente, soit six jours au lieu de trois.

Travail égal, salaire égal?

M. Laroche n'était pas au bout de ses peines, pointé du doigt pour sa politique de rémunération inéquitable envers ses employés féminins.

En juin 2017, une décision de la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité au travail (CNESST) déclare que le pub O'Bock est en contravention de la Loi sur l'équité salariale.

«L'équité salariale n'était pas, en date du 3 octobre 2016, réalisée pour l'ensemble des personnes salariées de l'entreprise», peut-on lire dans la décision.

En conséquence, la Commission exige que l'employeur «détermine les ajustements salariaux nécessaires afin d'accorder, pour un travail équivalent, la même rémunération aux personnes salariées qui occupent des emplois dans des catégories d'emplois à prédominance féminine, que celle accordée aux personnes salariées qui occupent des emplois dans des catégories d'emplois à prédominance masculine».

Par la voix de l'attaché de presse de la CAQ, M. Laroche se défend d'offrir un salaire inférieur aux femmes. Il indique que tous ses employés, hommes ou femmes, travaillent au salaire minimum avec pourboire.

Mais alors, comment expliquer qu'il se retrouve avec un blâme de la CNESST?

Il aurait tout simplement omis de remplir les questionnaires requis par l'organisme en matière de respect de l'équité salariale. Et pourquoi ne les a-t-il pas remplis? Mystère.

«Ouvert à tout si tu payes à boire»

L'entrepreneur a également organisé, en 2016 à la Saint-Valentin, un événement encourageant ses clients à porter un bracelet, afin de rendre ceux désirant avoir une relation sexuelle bien visibles: vert, s'ils sont «ouverts à tout, si tu payes à boire», jaune, «propose et on verra bien» ou rouge, «désolé, les meilleurs partent en premier».

Sur Facebook, il annonce aussi «chercher une ou deux filles» pour travailler quelques soirs par semaine au pub, et regarnir sa banque de candidates.

«Envoyez cv, avec date de naissance et photo», demande-t-il. Une internaute lui répond aussitôt: «Date de naissance et photo, ce n'est pas illégal ça?»

Stéphane Laroche rétorque: «Non, c'était pour éviter que tu m'envoies ton cv. Lol.» La Charte québécoise des droits de la personne interdit la discrimination à l'embauche sur des «renseignements» personnels.

Le comté de Saint-Jean, en Montérégie, est actuellement aux mains de Dave Turcotte du Parti québécois. En 2014, celui-ci avait été talonné par le candidat caquiste Serge Tremblay, qui avait perdu par 563 voix.