La déception a fait place à l'inquiétude au Parti québécois, au lendemain des élections. Le ministre des Transports sortant, Sylvain Gaudreault, constate un «déphasage» entre sa formation et la population, lui faisant craindre que le Parti libéral devienne impossible à déloger.

«Quand je vois qu'on n'a même pas 26% d'appuis, que les libéraux sont majoritaires - une majorité même pas serrée -, je sens un déphasage avec la population», indique Sylvain Gaudreault, en entrevue à La Presse.

Le député de Jonquière appelle à une profonde réflexion.

«Mon inquiétude, c'est que le Parti libéral devienne un «parti normal» de gouvernement, qui sera élu et réélu, comme le Parti conservateur en Alberta.»

Mieux vaut maintenant prendre son temps avant de se choisir un nouveau chef, croit-il. «La prochaine élection sera en octobre 2018, alors prenons le temps.»

Comme il aime le faire, Jean-François Lisée a choisi, lui, de prendre la plume, pour faire tout autant l'éloge de Pauline Marois que l'autopsie de la défaite. «Pauline, l'électorat a été dur, hier. Dur surtout envers notre grand rêve d'un pays à faire. Dur comme une troisième défaite référendaire.»

Cette défaite, selon M. Lisée, tient à une chose. «De quoi t'en ont-ils voulu? [...] De vouloir, de tout ton coeur et de tout ton cerveau et de toutes tes tripes, donner aux Québécois un pays».

En fait, poursuit-il, «tu as perdu parce que tu voulais laisser entrouverte la possibilité d'offrir aux Québécois le choix, si un jour ils le voulaient, de se donner un pays.»

Le parti d'une génération?

Depuis Paris où elle est installée pour quelque temps et où elle a suivi la déconfiture du Parti québécois, l'ex-ministre péquiste Louise Beaudoin croit aussi que la question du référendum a été centrale. Mais au-delà de cela, que conclure?

«Le fait que les Québécois ne veuillent pas entendre parler de référendum, est-ce pour l'instant ou à tout jamais?»

Là n'est pas la seule question qui attend le PQ dans ce douloureux bilan.

Avant toute chose, le PQ doit à son avis se demander «si le Parti québécois a été le parti d'une seule génération».

«Dans ses mémoires, René Lévesque écrivait déjà que les partis politiques ne sont pas faits pour vivre éternellement.»

La réponse à cette question, seuls les jeunes peuvent la donner, poursuit Mme Beaudoin. «Pour Alexandre Cloutier, Véronique Hivon, pour tous ces jeunes qui ont été élus ou pas - Léo Bureau-Blouin, Martine Desjardins, aussi -, ce n'est plus le temps d'être des pions, ce n'est plus le temps de la langue de bois. C'est le temps de la parole libérée.»

Si l'on en venait à la conclusion que le Parti québécois a toujours sa raison d'être, encore faudra-t-il qu'il clarifie les choses. «Le parti est-il à gauche? À droite? Est-il social-démocrate? [...] Veut-il faire l'indépendance ou pas? Et tous ceux qui ont quitté le parti, au fil des ans, pourquoi l'ont-ils fait?»

Peut-être aussi aurait-il fallu se poser une ou deux questions au lendemain de la déconfiture du Bloc québécois.

Quand c'est arrivé, raconte Mme Beaudoin, «on a traité cela avec désinvolture au Parti québécois. Le PQ, ce n'est pas le Bloc, s'est-on dit».

Le PQ devrait-il effacer son article 1 et ne plus aspirer qu'à gouverner? Mme Beaudoin l'ignore et elle avoue n'avoir aucune réponse. Que des questions.

Pour sa part, Pierre Curzi, un autre «ex» du PQ, fait une lecture toute personnelle de la défaite. Pour lui, le piètre résultat électoral n'est pas un désaveu de la souveraineté, mais de la démarche référendaire. Évoquant la voie des initiatives populaires, M. Curzi croit et espère que «la question du destin national revienne aux citoyens. Elle doit désormais être traitée en dehors de la partisanerie».

Il croit aussi que le PQ a payé pour le déclenchement prématuré d'élections alors que le peuple lui avait donné un mandat minoritaire il y a si peu de temps. L'incapacité à s'entendre avec Québec solidaire a fait le reste, selon lui.

Une combinaison qui a déplu

Louise Harel attribue, elle, cette défaite à «une combinaison explosive des thèmes de la Charte et du référendum». «Le projet de charte n'était pas suffisant pour que le PQ fasse le plein de votes, mais il a été suffisant pour que plein de monde vote massivement contre lui.»

Le thème de l'indépendance n'a certes pas été porteur cette fois, au contraire, «mais il faut se méfier des avis de décès de la souveraineté», prévient-elle, rappelant que Pierre Elliott Trudeau avait déjà donné là-dedans, bien à tort.

Et qui devrait être chef? Toutes les personnes interrogées se sont bien gardées de lancer des noms.

Tout au plus Louise Harel a-t-elle dit qu'il faut se garder d'attribuer la défaite à l'entrée en scène de Pierre Karl Péladeau, dont la présence est «très positive», à son avis.