La Loi 101 ne doit pas s'appliquer aux entreprises de juridiction fédérale, croit Philippe Couillard. «Je vais être très clair avec vous: on ne fera pas ça», a-t-il affirmé en conférence de presse à Québec.

Pauline Marois l'a mis au défi de proposer cette mesure, qui assujettirait à la Loi 101 les banques, télécommunications ainsi que le transport maritime, aérien et ferroviaire. Lors de la dernière campagne électorale, Jean Charest avait proposé de négocier avec Ottawa pour élargir ainsi la portée de la Loi 101. Il y avait renoncé le lendemain.

Son successeur a une position claire. «On ne touchera pas aux entreprises de juridiction fédérale», assure-t-il.

Le chef libéral ne veut pas de «proposition législative ou coercitive» pour protéger et renforcer la Loi 101. Un «équilibre» a été atteint avec la loi actuelle, a-t-il déjà soutenu plus tôt durant la campagne électorale. Il préfère miser sur la «valorisation, facilitation et l'accompagnement».

David Robitaille, professeur de droit à l'Université de Sherbrooke, soutenait cette semaine dans Le Devoir que l'évolution de la jurisprudence canadienne irait dans le sens d'un élargissement de la portée de la Loi 101. M. Couillard n'avait pas pris connaissance de ce texte. «C'est un peu comme la météo. Il y a plusieurs avis légaux sur un même sujet», a-t-il d'abord commenté.

Il a ajouté que la plupart des avis vont dans le sens contraire. Si les avis juridiques en ce sens devaient être «unanimes et indubitables», il se rangerait derrière eux. «Mais j'en doute.»  

Un État laïc pour encourager les pratiques religieuses, dit Couillard

Tout en menant une bataille pour la laïcité, le Parti québécois veut maintenir le crédit d'impôt aux organismes religieux. M. Couillard est du même avis.

«Tout à fait», a-t-il répondu quand on lui a demandé s'il voulait lui aussi maintenir ces avantages. 

Selon des estimations faites par La Presse, ce crédit coûterait entre 50 et 100 millions de dollars par année aux contribuables. Un crédit d'impôt est notamment offert pour les dons privés. En outre, ces organismes ne paient pas d'impôt sur leur revenu, ni d'impôt foncier.

Selon le chef libéral, c'est compatible avec la laïcité. «Ce qui serait anormal, ce serait d'avoir un crédit d'impôt qui ne favorise qu'une religion. Ce que veut dire la neutralité religieuse, c'est que l'État ne favorise ni ne défavorise aucune religion par rapport à une autre», a-t-il expliqué.

L'État pourrait donc encourager les croyances religieuses, tant qu'il le fasse de façon équitable pour toutes les croyances. «La neutralité religieuse de l'État ne signifie pas que l'État ne veut pas de religion. Ça signifie que l'État est neutre entre les religions. C'est comme ça que beaucoup de pays l'appliquent», a-t-il soutenu, en référant notamment aux États-Unis.

M. Couillard a promis de mettre en place un comité permanent de révision des programmes gouvernementaux afin de vérifier leur efficacité et de retrouver l'équilibre budgétaire. Le fera-t-il pour les crédits d'impôts religieux?  «Pour moi, efficace veut dire que (le programme) atteigne son but. Le but est légitime. De permettre dans une société l'expression du sentiment religieux, qui est profondément humain, ça m'apparaît tout à fait correct. De se donner les moyens pour le faire, aussi, en autant que ce soit égal.»